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Critique de HordeDuContrevent


Un goût de trop peu au sillage envoutant…

Peut-être les avez-vous déjà remarqué ces petits livres blancs de science-fiction comportant un dessin élégant en couverture ? Il s'agit de la collection « Une heure-lumière » des éditions du Bélial', six à sept nouveaux romans chaque année venant grossir les rangs de cet ensemble permettant à tout à chacun de lire de courts romans de SF, des novellas comme on les appelle souvent, situés entre la nouvelle et le roman classique. Comme l'explique @_Thalestris_ en préambule de sa liste créée spécialement pour présenter cette collection, « une heure-lumière, c'est la distance que parcourt un photon dans le vide en 3600 secondes, soit plus d'un milliard de kilomètres. Une distance supérieure à celle séparant Jupiter du Soleil. Ce qui nous emmène déjà très loin… », traduisant le fait qu'avec ces courts romans, tous ont autour de cent pages, il est possible au lecteur de lire d'une traite une histoire de science-fiction, lecture certes rapide mais cependant lecture qui fait voyager loin, dans l'espace et dans le temps, source de dépaysement, d'étonnement, d'émerveillement parfois, de prise de conscience très souvent.
C'est tout un art de faire court tout en sachant marquer les esprits et les nombreux prix que ces livres se sont vus attribuer – prix Hugo, prix Nebula et Locus - montrent que l'objectif est souvent atteint. Et chacun peut y trouver la SF qui lui plait ou qu'il souhaite justement découvrir, entre hard SF, utopie, dystopie, space-opera, planet-opera, voyage dans le temps, il y en a pour tous les goûts.


Dans un décor aquatique, une ambiance humide et chaude, « le choix » de Paul J. McAuley est une histoire d'amitié sur fond de bouleversement écologique majeur - une montée des eaux dramatique, la disparition quasi totale des espèces animales dont on parle désormais avec nostalgie et une élévation de la température moyenne considérable. Cette SF post-apocalyptique dans laquelle nous commerçons et négocions avec des extraterrestres dont on ne connait que les vaisseaux et capsules, met en valeur le futur écologique qui nous attend si nous ne faisons pas aujourd'hui certains choix. Il a le mérite également de se focaliser sur les laissés pour compte qui n'ont pas pu partir, ou n'ont pas voulu, partir notamment dans d'autres régions, voire sur d'autres planètes, et qui survivent comme ils peuvent au gré de l'élévation du niveau des eaux. C'est le cas de la mère militante de Lucas, jeune garçon de 16 ans, désormais malade, qui vit dans une caravane de fortune déplacée lorsque cela devient indispensable.

Au coeur de ce Norfolk anglais noyé sous les flots et écrasé de chaleur, la rumeur se répand : un Dragon est tombé du ciel non loin des côtes. Lucas et son meilleur ami Damian, sur leur petit voilier, entreprennent le périlleux voyage en quête du mystérieux artefact extraterrestre, avec en tête un espoir secret : décrocher la clé des étoiles…L'histoire montre que nos destins sont des colliers de choix incessants, perles égrenées conduisant à notre salut ou à notre fin.

C'est une lecture à la fois angoissante, nostalgique mais aussi étonnamment poétique qui dégage un charme singulier. L'eau et la brume qui souvent la surplombe du fait des températures élevées, créent une ambiance ouatée et mystérieuse. Emergent de l'eau des clochers d'église, des pylônes, des branches d'arbres noires abimées par des années d'embruns sales et d'infiltration d'eau de mer, entre lesquelles les deux amis se déplacent, se faufilent, étrange ballet caressé par de longues étendues d'herbes aquatiques, spectacle dont on devine les odeurs terreuses, le son des clapotis et des gouttes d'eau étouffé par le brouillard, le faseyement des voiles. Ce qui arrive aux deux adolescents est une histoire marquante touchant à l'intime, elle est narrée avec poésie et mystère.

« Ils entamèrent alors la traversée d'une étendue plus large, avec à bâbord la petite ville d'Acle étalée sur un modeste promontoire. Un clocher ayant perdu ses ardoises sortait de l'eau comme un phare squelettique, surmonté d'une croix polie qui semblait enflammée de soleil. Une rangée de vieux pylônes s'éloignait, la plupart très inclinés, avec dans leurs poutrelles des nids de héron, amas de petites branches blanchis par leurs excréments. Les pêcheurs avaient colonisé un des rares pylônes encore verticaux : on voyait des cabanes en bois flotté attachées à son support et une centrale houlomotrice en barils de pétrole déployée en-dessous ».


Au final cette nouvelle a un gout de trop peu tant l'histoire est envoutante mais la cicatrice qu'elle laisse en nous est réelle, une cicatrice rose et lisse en apparence mais dont on devine la texture fibreuse quand on appuie dessus.. L'art d'une nouvelle réussie !

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