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Critique de xst


xst
20 février 2020
L'action se passe en Angleterre dans les années 70. Entièrement fictive, cette histoire est cependant inspirée d'un scandale en Occident quand le magazine littéraire américain Encounter avoue avoir été secrètement financé par la CIA (1967).
Serena Frome, tout juste diplômée de Cambridge, est recrutée par le MI5. D'abord affectée à des tâches de secrétariat sans responsabilité, on lui confie dans le cadre de l'opération sweet tooth la mission de « recruter » un écrivain capable de promouvoir par ses écrits l'idéologie nationale à une époque (on est en pleine guerre froide) où le gauchisme envahit les campus et les milieux culturels. C'est la guerre froide culturelle, la preuve que la littérature peut être une arme politique et, à ce niveau, le MI5 est en compétition avec le MI6.
Serena va donc rencontrer Tom Haley, un écrivain prometteur dont les idées sont conformes (à priori) à celles du gouvernement. Il n'a publié que de courtes nouvelles et cherche un éditeur. Elle doit lui offrir, sous couvert d'une fondation bidon, une bourse qui lui permettrait de se consacrer à l'écriture à temps plein. Seulement voilà, ils vont tomber éperdument amoureux l'un de l'autre et Serena fait désormais face à un terrible conflit : rester fidèle à ses engagements vis-à-vis du MI5 et cacher à son amant la vérité ou tout lui dire.
Catch 22 : dans les deux cas, elle est perdante.

Satyre d'une époque turbulente où la paranoïa l'emporte sur le bon sens : grève des mineurs entraînant une crise énergétique et des restrictions sévères, escalade du conflit en Irlande du Nord, et guerre froide, dans ce récit, Ian McEwan continue son exploration de la société et de ses contradictions. Visiblement, pour McEwan, le problème n'était pas tant la croisade anti-communiste elle-même que le secret avec lequel elle a été menée. Mais c'est aussi une réflexion sur la littérature sous ses différentes formes dans la mesure où Ian McEwan oppose Serena, lectrice compulsive et profane, qui préfère une littérature ancrée dans le réel alors que Thomas, diplômé en littérature, érudit, préfère une approche plus moderniste et aime jouer avec le lecteur.
Plusieurs critiques ont souligné le côté autobiographique du roman, le personnage de Thomas Haley partageant de nombreux traits et détails biographiques avec l'auteur. Ian McEwan le reconnaît lui-même et a dit, à propos de ce livre, que c'était un récit atténué, ou métamorphosé de moi-même en tant que jeune écrivain (« a muted, or transmuted, memoir of myself as a young writer »)
Sans vouloir révéler le punch final, je trouve que la réussite de ce roman est dans sa forme. En effet, Ian McEwan nous livre ce qui semble être un récit direct à la première personne, pour déformer cette impression à la toute fin. Métafiction dans toute sa splendeur
Et, plus qu'une histoire d'espionnage, c'est aussi une belle histoire d'amour.
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