Etes-vous hypnotisé vous aussi ? Regardez bien la jolie couverture des Pleurs du vent et vous serez comme moi, attiré par ces vagues. Et comment résister à ce titre si poétique ? Sorti au Japon en 1997, les éditions Zulma ont eu l'excellente idée de publier ce roman japonais en français. Un court roman où il est question de deux hommes qui ont vécu la bataille d'Okinawa, la dernière bataille de la Seconde Guerre mondiale. Et il y a aussi ce crâne qui pleure, et cette peur, cette honte qui habitent les personnages. Je remercie les éditions Zulma pour cette sublime lecture.
Ile d'Okinawa, au Japon, dans les années 80. le crâne est ici un des personnages principaux de cette histoire. Objet sacré, maudit ou vénéré, il représente toutes les victimes japonaises décédées pendant la Seconde Guerre mondiale, quelles soient soldats kamikazes ou civiles. Il existe depuis quarante ans un mystère autour de ce crâne qui surplombe la falaise et contemple la mer. Les rumeurs et le mystère qui l'entourent ont engendré une sorte de malédiction autour de ce crâne ayant appartenu à un kamikaze. Que semble cacher Seikichi ? Pourquoi est-il si terrifié lorsqu'on lui parle de ce crâne ? Que cache à son tour Fujii, venu enquêter sur la légende du crâne qui pleure ? En tout cas, ce crâne provoque chez ces deux personnages un réveil brutal de leurs douloureux souvenirs, du temps de cette bataille d'Okinawa.
"Jusqu'à présent, personne n'avait jamais eu l'idée de parler sérieusement du crâne qui pleure à quelqu'un d'extérieur au village. D'abord parce le sentiment d'avoir une dette envers ceux qui étaient morts à la guerre interdisait aux survivants de parler à tort et à travers des disparus, mais surtout parce que quiconque entendait la triste lamentation du vent ne pouvait qu'être saisi de stupeur. Dans le village, où il était défendu de pointer du doigt un cimetière car cela portait malheur, il y avait des gens qui ne pouvaient pas même lever les yeux vers le crâne qui pleure, lequel depuis les vestiges de l'ossuaire en plein air continuait à regarder la mer." (pp. 40-41).
Ainsi, dans ce court mais intense roman, il est question de cette bataille sanglante qui dura 22 jours et qui fit tomber plus de 77 000 soldats japonais et plus de 14 000 soldats américains. Les personnages sont comme encore "sonnés" par cette guerre, même quarante ans après. Elle leur a laissé une empreinte indélébile. le bruit terrifiant provenant du crâne terrifie Seikichi depuis des années et lui rappelle incessamment ce qu'il a vécu avec son père il y a quarante ans. Quant à Fujii, le journaliste, il a ressenti cette peur féroce de mourir, celle qu'il a ressentie alors qu'il était soldat-kamikaze. Il était même en colère contre son propre Empereur, et se posait des questions sur cette guerre. Vous l'aurez compris, ce livre donne énormément à réfléchir sur la souffrance engendrée par la guerre. Ces personnages pourront-ils un jour s'en délivrer ?
En conclusion,
Les Pleurs du vent est un court roman dans lequel deux destins d'hommes se croisent. L'un a vécu la bataille d'Okinawa en aidant son père blessé, en évitant les soldats américains qui grouillaient le sol de l'île. L'autre était soldat et aurait dû finir kamikaze comme ses camarades. le crâne qui pleure font ressurgir leurs souffrances à chaque instant. Quel est le mystère qui entoure ce crâne ? Seikichi et Fujii réussiront-ils à surmonter leurs douleurs ? de même, ce roman laisse une grande place à la nature, l'autre grand personnage du livre. La falaise, la mer, le vent, la rivière, le banian. Tous sont acteurs. L'auteur les décrit si bien qu'on a l'impression nous aussi de se trouver au pied de cette falaise mystérieuse ou bien au coeur de cet ossuaire. Alors, lisez ce roman. Peut-être même que vous aussi vous entendrez
les pleurs du vent...
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