- Tu as quatre-vingt-deux ans. Qu'est-ce que tu attends de la vie ?
- Je n'attends rien, chérie. J'ai attendu toute ma vie, justement. Je comprends seulement maintenant qu'il n'y a rien à attendre. Il faut tout aller chercher par soi-même. Tu passes ta vie à attendre que la roue tourne. Eh bien, tu sais quoi, la roue, c'est à toi de la faire tourner. C'est bête parce que moi, ça, je ne le comprends qu'aujourd'hui. (p.146)
C'était tellement agréable cette sensation d'être utile,
au coeur des choses.
Ces dernières années, je me suis sentie si souvent mise à l'écart
par ma famille.
Nous n'avons plus de temps à perdre avec les plaintes, les regrets, les hésitations. A nos âges, nous sommes libérées de toutes les contraintes qui pourrissent la vie des hommes, qui ont pourri nos propres vies pendant quatre-vingts ans. (p.58)
Il y avait ici un ingénieur, des commerçants, un dentiste, des ouvriers, des mamans, un pianiste, une étudiante en biologie sous-marine. J'ai compris à ce moment précis que, jusqu'à ma rencontre avec Lucienne, je n'aurais sans doute vu en eux que des sans domicile fixe.
Les apparences sont toujours trompeuses. Ce jeu des regrets est décidément plein de surprises et se révèle terriblement grisant.
A s'effacer tout le temps pour le bien des siens, on finit parfois par se faire disparaitre soi-même.
Je sais bien qu'il faut vivre avec son temps, mais.... parfois, je me demande si le monde n'est pas devenu un peu con quand même.
Je sais bien qu'il faut vivre avec son temps, mais...parfois, je me demande si le monde n'est pas devenu un peu con quand même. (p. 250)
Nous pourrions mourir demain, et alors, à quoi bon laisser les heures s'écouler ?
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on n'a pas la vie devant nous, n'est-ce pas?
« Je m’appelle Jeanne Legaud, j’ai quatre-vingt-un ans, cinq enfants, dix petits-enfants et treize arrière-petits-enfants. J’ai consacré ma vie à ma famille et j’étais persuadée, jusqu’à peu, d’avoir été une bonne mère. Depuis que je suis ici, j’émets certains doutes. Si j’avais bien fait mon travail de maman, ces sales gosses ne m’auraient pas jetée ici. Il y en aurait eu au moins un pour s’opposer à cette hérésie familiale, non? »