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Critique de viou1108_aka_voyagesaufildespages


Nora Eldridge est une institutrice dévouée et compétente, qui travaille dans une école primaire de Boston. Jeune quarantenaire, elle est célibataire et sans enfants. Sa mère est morte deux ans plus tôt, et elle n'a plus qu'un frère à l'autre bout des USA, son père vieillissant et sa vieille tante Baby : « jamais mariée, elle était catholique pratiquante et ce que je redoutais le plus de devenir : vaillante, indépendante et totalement sans raison d'être ». Car en dehors d'une amie et quelques copines, et de son travail, la vie de Nora est vide. Ou en tout cas, elle la ressent comme telle : un vide abyssal et dépourvu de sens qu'elle ne sait comment combler. Elle se voit comme une « femme d'en haut », la voisine sympa et souriante mais dont vous ignorez absolument tout, parce qu'elle évite de prendre de la (sa) place et de se dévoiler : « ...la douce et accommodante, la calme et responsable Miss Eldridge, amie modèle, fille modèle, enseignante modèle, Miss Eldrigde la carpette, Miss Rien du Tout à qui tout le monde sourit si chaleureusement avant de l'oublier aussitôt ». Nora rêve, crève, de besoin et d'envie d'exister et d'être visible, mais elle a du mal à échapper à ses démons. L'espoir renaît soudain lorsqu'un nouvel élève arrive dans sa classe, et qu'elle fait connaissance avec ses parents. Avec Sirena, surtout, artiste plasticienne qui la fascine aussitôt. Il faut dire que Nora est une artiste frustrée, qui avait, il y a longtemps, imaginé pouvoir vivre de son art, avant de se rabattre sagement vers le métier d'institutrice. La famille composée par Sirena, son mari et leur fils est et a tout ce dont Nora a toujours rêvé : un couple, un enfant, un métier passionnant. A travers l'amitié puis la collaboration que lui offre Sirena, Nora croit à nouveau en son étoile, convaincue que tout est à nouveau possible, que cette relation et le regard de Sirena vont lui permettre d'enfin vivre vraiment et de s'épanouir en tant qu'artiste. L'espoir est donc là, reste à le concrétiser. Car au final, il faut bien le reconnaître, Nora se cantonne à vivre à travers Sirena et à se dévouer pour la prochaine exposition de celle-ci, plutôt que de suivre son propre chemin. Comme dans la chanson, « la vie par procuration ».

« La femme d'en haut » raconte un épisode de la vie d'une femme en colère, contre elle-même et le monde entier, et qui, arrivée à la moitié de son existence, est persuadée d'avoir gâché sa vie, et qui attend désespérément de vivre dans et par le regard et la reconnaissance des autres. A-t-elle raison de penser qu'on n'existe qu'à travers les autres ? Sans doute pas. Question complexe. Mais difficile de penser autrement quand on se considère totalement transparent. Et le plus important : savoir si on a encore assez d'énergie ou de colère en soi pour réagir et se révolter.

Sur les thèmes de la solitude, des espoirs fous et des frustrations et désillusions proportionnellement cruelles, du cynisme du monde de l'art, et surtout de la définition d'une vie réussie ou au minimum satisfaisante, « La femme d'en haut » est un roman cruel, interpellant et même bouleversant.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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