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Critique de oiseaulire


Emouvant roman autobiographique : un petit garçon non désiré, maltraité et humilié par ses parents ("Dedans"), parvient, grâce à l'école ("Dehors"), à vivre malgré tout une vraie vie d'enfant et d'adolescent.

- Du "Dedans", l'adulte gardera des fêlures.

- Du "Dehors" des images enchantées : la cour de l'école, le marronnier qui fait de l'ombre à sa classe, les premières amours, sa rencontre avec la littérature (Gide, Péguy, Sartre, Ponge, Grainville), la musique, la philosophie ;
ou plus sombres : la mort d'un camarade de classe ; le suicide du fils d'une enseignante ; une partie de gendarmes et de voleurs qui faillit mal tourner ; l'héroïsme inattendu d'un camarade ; une agression par une bande de voyous ; ses rapports conflictuels avec les mathématiques ; ses premières amours, tâtonnantes, au propre et au figuré.

J'ai été très touchée par le petit héros qui lui sauva la mise ; par la relation tendre et platonique qui le lia à une jeune lycéenne, malheureuse comme lui, et qui trouva son apothéose quasiment extatique dans le partage de "L'expérience intérieure" de Georges Bataille.

Les deux parties mises en regard se répondent :

- "Dedans" sonne comme un appel à la vigilance à l'égard de ce qui peut se passer dans les familles lorsqu'elles se mettent à dérailler, véritables espaces féodaux clos sur eux-mêmes ; caisses à résonances où explosent les bombes à fragmentations de la haine de soi reportée sur sa propre descendance ;

- "Dehors" est une ode de remerciements à l'Ecole qui, en ouvrant accès au savoir, offre à l'enfant malmené un espace protégé de liberté et de créativité quasiment inaccessible de ses géniteurs.

L'enthousiasme et la curiosité intellectuelle de l'auteur se communiquent au lecteur de plus en plus avide, au fil des pages, de se plonger dans les oeuvres évoquées : on n'a pas envie d'en rester là, le feu sacré se communique comme un incendie salutaire, on a l'impression de sortir du long sommeil de l'incuriosité.

Le style du roman est riche, alerte, poétique, un univers se dessine dans lequel flottent des relents de notre enfance, qu'elle fut heureuse si nous fûmes choyés, ou plus chaotique pour ceux d'entre nous qui n'eurent pas cette chance.

"Orléans" se présente comme l'aboutissement de la démarche commencée dans "Naissance". Un homme est aux prises avec sa vie et la transforme en littérature avec panache, érudition et subtilité ("Naissance", brillante épopée multiforme) ; avec rage, douleur sincérité, et encore malgré tout un immense amour de la vie ("Orléans").

Il faut lire aussi "Naissance" pavé éblouissant que l'on prend dans la gueule dès qu'on l'ouvre et qui donne accès à une poésie et à un questionnement métaphysique qui ne vous abandonnent pas une fois le livre refermé.

Yann Moix a un talent forcené pour la phrase, le rythme, les images.

Qu'il est doux de s'abstraire des vaines polémiques et de se plonger dans les oeuvres ! Les hommes ne sont que des hommes ; leurs oeuvres les dépassent.

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