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Critique de gerardmuller


Une simple lettre d'amour/Yann Moix
Cette simple lettre d'amour met en lumière une certaine conception de l'amour qui risque de faire grincer des dents un certain nombre de lecteurs.
Pour belle et poétique, bien sculptée et ciselée que soit l'écriture de Yann Moix, il reste que globalement le fond peut être discuté et ne pas satisfaire nombre de lecteurs autant que la forme. Encore que nombre de phrases sonnent juste et je vais en citer quelques unes plus loin.
Le choix des mots et le style très mallarméen ou baudelairien sont un régal. Yann Moix joue avec les mots, les sublime, les exhausse.
« le nain se soulageait sur ton indifférence polie de sentences à peu près définitives, toujours triviales, collectionnées au zinc de ces bistrots de pâle aube où les buveurs hydrocéphales, giflés par les paquets de vinasse remuent –dans un silence d'épave leurs gueules de madrépores. » Un style saisissant !
Mais il en fait trop : il est franchement provocateur et ce dès l'entame quand il dit en parlant de la femme: « La définitive est incessamment la suivante. » C'est peut–être vrai en y regardant bien ! Mais on ne le dit jamais !
Le narrateur (Yann Moix ?) se fait un plaisir d'abîmer la beauté de la femme qu'il dit aimer: c'est pour lui une nécessité, une joie, un besoin. Il veut la connaître jusqu'au sang et visiter son « intime charogne. » Et il ajoute : « Tu ne resteras qu'une drôle de grimace, ta chair un appétit, tes journées un lieu pour mes vacances….Je greffe sur tes jeunes traits la figure avariée de ta mère…Celle que tu seras insulte celle avec qui je suis. »
Édifiant !
Il me paraît vrai que « La haine qu'on éprouve pour quelqu'un qu'on hait n'est rien à côté de la haine qu'on ressent pour quelqu'un qu'on aime ».
Une des plus belles phrases : « J'aimerais tellement que ma solitude trouve le courage de ne plus s'encombrer de la tienne. »
Telles des succubes apparaissent les femmes dans ces lignes puisque pour le sexe le narrateur préfère la présence des femmes ; pour le sentiment, il préfère leur absence.
Aucun vulnéraire ni électuaire ne semble apte à guérir notre prévaricateur de ce rejet de tout commerce autre que sexuel avec les femmes. Rien ne semble capable de contredire ses jugements. Irréfragable sentence !
L'ouverture, ce serait la négation du sexe : « Je formule l'hypothèse qu'une vie délivrée du sexe saurait procurer aussi, pour peu, non qu'on s'y résigne mais qu'on y aspire, une vie extraordinaire, superbe, rugissante, soulagée… » Et avec un trait d'humour : « La sexualité fut instituée, fut échafaudée, fut élaborée pour nous empêcher de lire tout Balzac. »
Sans illusions : « Emmêlés la nuit, étrangers le jour. Ennemis bientôt. »
Il n'est pas douteux que Yann Moix se livre ici à un exercice de style et ô quel style !
Quelques réticences que l'on ressente à la lecture du contenu de cette lettre de désamour un peu curieuse, on doit reconnaître la sincérité toute masculine de l'auteur, à moins que tout cela ne soit effectivement qu'exercice de style. Allez savoir !
D'un point de vue strictement littéraire et avec quelques phrases qui tombent juste sans discussion, je mets quatre étoiles.

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