Le capitaine Rivera considérait la ville depuis une fenêtre du onzième étage. Une jungle urbaine. Un concentré de violence, une mosaïque de couleurs et de religions, un cocktail de luxe et de crasse. Une bombe à retardement. Un miracle si elle n’explosait pas. « New-York de boue, New-York de fil de fer et de mort. Quel ange portes-tu caché dans ta joue ? » avait écrit son poète fétiche, Federico Garcia Lorca dont il partageait les origines hispaniques.
- Les Irlandais, ça me hérisse le poil ! Des générations de flics pourris.
- T'as raison. Même que mon père en était ! Moi, je suis dans l'autre camp, c'est plus clair comme ça.
"Celui qui a vécu à New York ne trouve plus aucun lieu à son goût", avait prévenu Henry James. Ces touristes avaient-ils conscience du piège dans lequel ils étaient tombés : comment désormais supporter le calme leurs villes de province, la faible agitation de leurs banlieues, alors que le cœur de la planète battait là, à Times Square?
Les hommes se croyaient les maîtres du monde, ils avaient tort. Un parfum, une silhouette, le timbre d'une voix, des yeux dans lesquels se noyer, et ils se mettaient à genoux. Déroutant.
New York avale les hommes et n'en recrache que les os. New York est omophage, n'oublie jamais ça.
Tom Casey allait faire la une des médias. Une méthode visant à encourager les témoignages, à localiser le ravisseur et à libérer la victime. Une course contre la montre. Grâce à Amber, la police retrouvait 94% des enfants disparus. Auparavant, ce chiffre atteignait tout juste 62%. Pas besoin d’un diplôme de Harvard pour deviner l’efficacité du système. La mobilisation payait. Et rien n’était de trop pour délivrer un enfant, surtout pour ses parents. Justement, le moment était venu d’innover, de renforcer le plan Amber.
– De quelle manière ? Avait réagi le lieutenant Sarah Fisher.
– Trois lettres : AT & T
American Telephone and Telegraph Company. Le plus grand fournisseur de services téléphoniques aux Etats-Unis.
– Un SMS…
– Plus que ça ! avait renchéri le capitaine Rivera. Un message multimédia, avec la photo du gamin en prime