... sept ou huit filles d'autour de Chaumont en Bassigny complotèrent, il y a quelques années, de se vêtir en mâles et continuer ainsi leur vie par le monde. Entre les autres, l'une vint en ce lieu de Vitry sous le nom de Mary, gagnant sa vie à être tisserand, jeune homme bien conditionné* et qui se rendait, à un chacun, ami. [...] Depuis étant allé audit Montier-en-Der, gagnant toujours sa vie audit métier, il devint amoureux d'une femme, laquelle il avait épousée, et vécut quatre ou cinq mois avec elle avec son consentement, à ce qu'on dit ; mais ayant été reconnu par quelqu'un dudit Chaumont, et la chose mise en avant en justice, elle avait été condamnée à être pendu : ce qu'elle disait aimer mieux souffrir que de se remettre en état de fille. Et fut pendue pour des inventions illicites à supplir* au défaut de son sexe.
L'autre histoire, c'est d'un homme encore vivant nommé Germain, de basse condition, sans nul métier ni office, qui a été fille jusques en l'âge de vingt-deux ans, vue et connue par tous les habitants de la ville, et remarquée d'autant qu'elle avait un peu plus de poil autour du menton que les autres filles ; et l'appelait-on Marie la barbue. Un jour, faisant un effort à un saut, ses outils virils se produisirent, et le cardinal de Lenoncourt, évêque pour lors de Châlons, lui donna nom Germain.
*bien conditionné : de bon caractère
*supplir : suppléer
M. de Montaigne disait qu'il s'était toute sa vie méfié du jugement d'autrui sur le discours des commodités des pays étrangers, chacun ne sachant goûter que selon l'ordonnance de sa coutume et de l'usage de son village, et avait fait fort peu d'état des avertissements que les voyageurs lui donnaient ; mais en ce lieu, il s'émerveillait encore plus de leur bêtise, ayant, et notamment en ce voyage, ouï dire que l'entre-deux des Alpes en cet endroit était plein de difficultés, les mœurs des hommes étranges, chemins inaccessibles, logis sauvages, l'air insupportable.
Il me vient dans l’idée que ces douleurs étaient causées par ces vins doux et fumeux du pays, parce que la première fois que la migraine me reprit, tout échauffé que j’étais déjà, tant par le voyage que par la saison, j’avais bu grande quantité de trebbiano, mais si doux qu’il n’étanchait pas la soif.
Il y a encore tant d’étourneaux que vous en avez un pour deux liards.
j’envoyai chercher la nuit même un apothicaire qui me donna de l’eau-de-vie pour tenir du côté où je souffrais le plus, ce qui me soulagea beaucoup.
Il y a ici de quoi boire et aussi de quoi se baigner. Un bain couvert, voûté et assez obscur, large comme la moitié de ma salle de Montaigne. Il y a aussi certain égout qu’ils nomment la doccia : ce sont des tuyaux par lesquels on reçoit l’eau chaude en diverses parties du corps et notamment à la tête, par des canaux qui descendent sur vous sans cesse et vous viennent battre la partie, l’échauffent, et puis l’eau se reçoit par un canal de bois, comme celui des buandières, le long duquel elle s’écoule.
C’est une petite ville, située en un lieu fort aquatique, qui n’est pas trop bien bâtie ni fort agréable, quoiqu’elle soit traversée par un ruisseau qui en emporte les immondices.
Il se trouve quasi à toutes les hôtelleries des rimeurs qui font sur-le-champ des rimes accommodées aux assistants. Les instruments sont en toutes les boutiques, jusques aux ravaudeurs des carrefours des rues.
quand je voulais sortir, je trouvais partout pour faire la conversation des femmes et des hommes avec lesquels je pouvais me distraire quelques heures dans la journée ; et puis des ateliers, des églises, des places. Et comme je changeais toujours d’endroit, je ne manquais jamais de matière pour repaître ma curiosité.
Ils ont grande abondance de choux cabus, qu’ils hachent menus avec un instrument exprès, et ainsi hachés mettent grande quantité dans des cuves avec du sel, de quoi ils font des potages tout l’hiver.