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Critique de HordeDuContrevent


Une farandole littéraire libre et pétillante…

C'est vertigineux quand nous prenons le temps d'y réfléchir quelques instants, toutes ces vies qui se nichent derrière chaque personne, tous ces possibles à raconter, à détailler, à entrevoir. Toutes ces richesses. Chaque jour, les personnes croisées sont autant de bulles de vie qui s'entrechoquent tout en s'ignorant. Christine Montalbetti, dont je découvre l'écriture pétillante, part de cette idée dans « le relais des amis » qui offre quelques heures de lecture très agréables. le lecteur, souvent interpellé par l'auteure, y découvre une galerie de personnages, abordés de relais en relais, selon un principe ludique et joyeux de passage de témoin : via une mouche s'échappant d'un appartement, un postillon atterrissant sur la personne d'en face, une visioconférence entre deux personnes à l'autre bout du monde, des ronflements amples traversant une cloison, une paire de Converse, une mouette…
La force de cet écrit étant de réussir à nous attacher, à nous émouvoir, chaque personnage du collier, pourtant entraperçu rapidement, devient un être à part entière, avec ses espoirs et ses regrets, ses relations humaines plus ou moins compliquées, celles qui commencent, celles qui patinent et se terminent. Un collier d'humanité, une brochette de si, une ronde de possibles en un traveling réjouissant.

« Ces ébauches de possibles se contentent alors de scintiller comme des espèces de papillons sur la prairie de vos pensées (je le dirais comme ça), et leurs battements d'ailes malgré tout vous accompagnent ».

Ce voyage nous permet ainsi de partir de Simon, un écrivain qui, en panne d'inspiration, part se promener jusqu'au Relais des amis, bar dans lequel il retrouve quelques habitués sur lesquels l'auteure va faire quelques zooms, puis de passer à Lorette de l'agence immobilière d'à côté qui emmène son client Bastien visiter un appartement…et voilà, le traveling un peu vertigineux commence, nous permettant, de fil en aiguille, de regarder passer les bateaux sur le fleuve Douro au Portugal, de nous promener en pleine nuit à Kyoto, de jouer au pachinko à Tokyo, de marcher sur les rives d'un lac du Colorado, de flâner sur une plage normande…C'est un vent de liberté qui nous autorise à faire un délicieux petit tour du monde, tel un pur moment de cinéma.

« Oui, c'est avec eux à présent qu'on embarque, vous commencez à comprendre le principe, à eux que Rémi passe le bâton de relais, d'autant que le train, ça nous ouvre de nouveaux horizons ».

Par moment Christine Montalbetti nous questionne directement : quel personnage choisir, là tout de suite : « Attention, on n'a que quelques secondes pour se décider. Qu'est-ce qu'on fait ? Je me dis que si on monte avec elle, on sera plus vite arrivée à la mer », pour mieux ensuite nous balloter et nous imposer sa propre fantaisie. Ce livre ose, interpelle, digresse, pose des parenthèses, alterne les passages à l'écriture ciselée avec des passages aux expressions familières et aux analogies surprenantes. C'est un véritable éloge à la littérature, aux voyages immobiles qu'ils permettent, aux mille et une vies qu'ils abordent, à la liberté qu'ils autorisent.


Les livres, un espace préservé dans lequel nous pouvons évoluer librement et toucher du doigt toutes les sensations du monde…tel est le message primordial de ce récit qui en faisant éclater quelques bulles de vie bondissant en tous sens m'a fait l'effet légèrement enivrant d'une fine bulle de champagne. A petite dose, cette ivresse est délicieuse, à plus grande dose cela aurait pu être un tantinet écoeurant. le dosage ici est parfait même si ça confine, nous devons le reconnaitre, à l'exercice de style.

« Ces impression caracolent dans son coeur comme des poulains sauvages, et est-ce qu'il finira par lancer enfin vers elles le lasso de ses phrases, zui zui, la courbe onduleuse et graphique de leur longue lanière, hop là, pour s'efforcer d'attraper telle ou telle d'entre elles sur laquelle il commencera (prudemment, joyeusement) à mettre des mots, on le lui souhaite ».
Simon, je ne sais pas, mais vous, vous y arrivez merveilleusement Madame Montalbetti !

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