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Critique de Manonlitetvadrouilleaussi


Nous sommes habitués avec les éditions Dépaysage à découvrir des textes qui sortent de l'ordinaire, mais Sanaaq se distingue des ouvrages de la maison d'édition que j'ai pu lire jusqu'à présent. Ce n'est pas tant son caractère romanesque (bien que pour une majeure partie autobiographique) qui a retenu mon attention en premier lieu, mais bien l'histoire de la genèse du livre, et le travail de longue haleine qui a permis que nous l'ayons entre nos mains françaises en 2022.

Sanaaq, c'est un texte commencé dans les années 50 et qui s'échelonna sur vingt ans. C'est un millier de pages en caractères syllabiques écrit par une autodidacte qui n'est jamais allée à l'école, Mitiarjuk Nappaaluk. C'est (sans doute) le premier roman autochtone canadien. Mais c'est aussi la rencontre entre l'auteure et l'anthropologue Bernard Saladin d'Anglure, qui a translittéré puis traduit le texte avant de le publier dans les années 80, et de le réviser entièrement pour cette nouvelle parution.

Que raconte ce roman ?
Nous suivons sur plusieurs années, Sanaaq, une jeune veuve qui vit au jour le jour, à la rudesse des saisons sur son territoire de Nunavik. Scènes de vie quotidienne du peuple Inuit, ce roman nous permet de découvrir les us et coutumes et la psychologie des autochtones. Chasse et pêche (des scènes pas toujours évidentes à lire pour moi), construction d'iglous, recherche d'un(e) compagn(e)on, liens familiaux et sociaux, violences, mais aussi esprits chamaniques sont au rendez-vous.

Mitiarjuk Nappaaluk y insère également de nombreuses références historiques avec notamment l'arrivée des premiers Blancs, des missionnaires anglicans, du premier avion, mais également de la première évacuation aérienne médicale ou de la venue d'un agent des Affaires Autochtones. Mais c'est aussi un peu d'elle aussi dont il est question. En parcourant sa biographie, on découvre qu'elle a aussi bien profité des enseignements de sa mère pour les tâches dites féminines que ceux de son père pour toutes les activités masculines, n'ayant jamais eu de fils. Dans sa préface, Bernard Saladin d'Anglure parle d'elle comme d'un « véritable troisième genre culturel et social ».

Une expérience de lecture assez déroutante lors des premiers chapitres, tant pas l'oralité de l'écriture, que pas une certaine distance émotionnelle du texte, assez ethnographique et anthropologique. Puis un changement s'opère, et c'est grâce à la postface que j'ai finalement compris pourquoi. À la moitié du récit, l'auteure ne s'est plus autocensurée. Et c'est grâce à ces chapitres, écrits à la demande de l'anthropologue, que la magie a opéré sur moi. Il est alors question de violences conjugales, de mythologie et croyance et de possession sexuelle…Mais je ne vous en dis pas plus, et vous invite à votre tour à découvrir ce texte singulier .
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