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Critique de kikenbook


"Ecrire est un acte politique. (…) C'est un livre pamphlétaire. (…). Pour moi c'était très important de ne pas écrire un essai parce qu'un essai, c'est chiant, c'est démonstratif, il ne s'agissait pas de démontrer, il s'agissait de parler au coeur avec le coeur, c'est ça la littérature." A. Nesnidal. (interview vidéo du 3 août 2018, chaine Youtube de la Librairie Mollat).

Voilà un auteur qui voulait donc écrire un pamphlet sur ce qu'il appelle "le monde de l'élite, le monde d'une bourgeoisie qui pratique l'escroquerie intellectuelle". Eh bien, sachez, mon cher Arthur-auteur, que si escroquerie il y a, elle est autant dans votre projet d'écriture que dans cette bourgeoisie, dont vous conspuez les pratiques. La seule chose à peu près réussie dans votre entreprise est le titre de l'oeuvre : La Purge. Il reflète à lui tout seul ce qu'est ce roman dans lequel un jeune écrivain (22 ans à la sortie du bouquin) couche ses fantasmes de militant politique en les faisant passer pour vérité universelle, nous fait croire que sa petite expérience personnelle de prépa hypokhâgne dans un lycée de Clermont-Ferrand vaut description d'un système (le mot préféré de ceux qui sont à cours d'argument) écrasant dont l'unique objectif est de déprécier les "pauvres gens".

Voilà donc 146 pages de branlette littéraire au cours desquelles Arthur-narrateur découvre sa plume, et l'astique dans tous les sens pour composer des phrases admirablement bien écrites, au rythme travaillé à la limite de l'alexandrin, aux images choisies avec grand soin, aux sonorités quasi-musicales, il ne manque que des rimes ! Mais voilà, Arthur, on peut peindre un mur pourri avec les plus beaux pinceaux du monde, le mur reste pourri, même derrière la peinture la plus criarde qui soit. Tu as eu beau caresser ta plume avec ardeur, il n'en est sorti aucun génie, que de l'aigreur. La beauté de tes phrases que certains qualifient d'ampoulées (c'est le risque d'un astiquage intensif) ne cache pas l'idéologie et l'escroquerie du fond.

Tu prétends avoir vécu l'enfer dans cet Hypokhâgne en nous racontant que tu l'abandonnes au bout d'un an tellement l'épreuve est difficile et tellement tes origines sociales (inconnues) et ton handicap (visuel) sont objets d'avilissement. Détail amusant, dans la réalité, tu y es resté 3 ans dans cette prépa : masochisme de classe ou petit arrangement avec la réalité pour servir le discours ? A partir de là, jusqu'où doit-on prendre pour argent comptant le délire grand-guignolesque mais littéraire d'un étudiant plein de rancoeur ? le self du lycée est décrit comme un bouge infâme, la première de la classe est forcément une fille, catho, grenouille de bénitier, professeure et intendante sont des monstres dont les descriptions grossophobes sont à gerber… Bref tout y est caricature, jusque dans les rares dialogues. Caricature ? Témoignage ? Roman ? Un moment donné il faut savoir sur quel terrain on joue, ici, on ne joue que dans la boue.
On n'endosse pas impunément un costume de loup pour faire comprendre aux autres qu'ils sont des moutons : le costume est mal taillé, il laisse percevoir cette espèce de condescendance (oui, à Hypokhâgne, ils étaient tous des incultes, le jeune homme se sentait perdu comme seul être cultivé et amoureux des lettres) qu'aurait le sachant sur ceux qui ne savent pas, comble du paradoxe quand il s'agit de critiquer l'élite ! le loup a beau jeu de se foutre du mouton suiveur quand il ne fait finalement que remâcher le discours du dominant de la meute à laquelle il appartient.

Désolé Arthur, ton petit gâteau littéraire, tout joli et soigné qu'il est, a le goût trop prononcé du vomi de ta hargne haineuse envers un "système" dont tu es le fruit gâté par une idéologie politique qui n'a pas eu, sur moi, l'effet que tu espérais. Tu voulais me faire croire que malgré les envies d'ascension, celui qui vient d'en-bas ne peut grimper, empêché qu'il est par "les bourgeois" ? Ta lutte des classes n'existe que parce que tu l'entretiens savamment par un semblant d'insoumission qui exploite la colère individuelle plutôt que l'intelligence collective. Tu prétendais parler au coeur avec le coeur, mais de coeur je n'en ai vu aucun dans ce texte. Les essais sont chiants, disais-tu, la rage aveugle l'est tout autant. Tu ne voulais pas démontrer, mais ce texte n'est que démonstration. Bref, le chien aboie, la littérature passe.
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