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Critique de hellrick


Ecrivain japonais né en 1930, Kyōtarō Nishimura n'a guère été traduit en français mais on peut cependant apprécier son très divertissant LES DUNES DE TOTTORi qui renouvelle le principe de la « disparition impossible » en l'appliquant à un…train entier rempli de voyageurs ! Un joli tour de force littéraire.
LES GRANDS DETECTIVES N'ONT PAS FROID AUX YEUX constitue un autre exercice de style puisque cette enquête à « huit mains » convie Ellery Queen, Hercule Poirot, Maigret et (moins connu des Occidentaux) Kogoro Akechi (détective imaginé par Edogawa Rampo). Les quatre « plus grands détectives du monde », certes vieillissants (ils sont à présent largement sexagénaires) mais toujours prêts à résoudre une énigme. Or voici que le millionnaire Sato les convie dans le but d'enquêter sur la disparition de trois cent millions de yens (environ deux millions de dollars). Les détectives refusent, prétextant que ce type d'investigation échappe à leurs compétences et relève de la police scientifique. Mais Mr Sato a réponse à tout : il va transformer l'affaire afin que les détectives puissent la résoudre. Pour cela il imagine un plan astucieux : brosser le portrait psychologique du coupable, trouver un individu qui réponds aux critères retenus et se laisser voler trois cent millions de yens. Les quatre enquêteurs pourront, dès lors, observer le comportement du voleur et élaborer les hypothèses pouvant mener à l'arrestation du premier criminel. Evidemment tout ne se déroule pas comme prévu et, à mi livre, le voleur est découvert poignardé. L'argent, évidemment, a disparu. Un simple meurtre pour faciliter le vol pensent les policiers. Mais les grands détectives, comme chacun le sait, ont leurs manies et leurs méthodes, pas toujours très conformes aux attentes. Ainsi, sur la scène du meurtre, « Ellery Queen ne s'intéresse qu'à un chapeau haut de forme et Hercule Poirot qu'a la position du fauteuil ! Quand à Maigret, n'en parlons pas, le célèbre détective du quai des Orfèvres, en face d'un cadavre et de la disparition de trois cents millions, ne voyait pas le mobile ! »
Hommage / pastiche littéraire de haute volée, LES GRANDS DETECTIVES N'ONT PAS FROID AUX YEUX s'inscrit dans la tradition du TROIS DETECTIVE de Léo Bruce ou du TROP DE DETECTIVES de Jacques Sadoul ainsi que du film « Un cadavre au dessert ». Bref, nous avons droit à quatre enquêteurs pour le prix d'un. Et non des moindres. Avec leur défauts et qualités évidemment : la suffisance de Poirot, l'humanisme de Maigret, l'entrain de Queen, etc.
Comme le roman a été écrit en 1971, nos enquêteurs ont, grosso modo, leur âge réel, soit entre 60 et 70 ans. Insistons sur cet âge réel car, sous la plume de Kyōtarō Nishimura, Poirot, Queen, Maigret et Kogoro Akechi existent bel et bien et les romans qui relatent leurs exploits respectifs sont d'authentiques compte rendus d'affaires criminelles célèbres. A l'image de Sherlock Holmes, nos détectives sont des « créatures » autonomes qui se sont extirpées des bibliothèques pour devenir charnel et poursuivre leurs exploits dans le Japon en pleine transition des seventies. Et ce qui a débuté comme une sorte d'expérience psycho-sociologique devient une véritable enquête sur un meurtre. A ce moment tous deviennent suspects car, comme le souligne Queen : « à partir d'une certaine somme d'argent chacun peut être coupable ». Nos détectives mènent donc l'enquête, chacun à leur manière, et désorientent la police officielle qui ne comprend rien à leurs élucubrations. Les rebondissements, eux, ne manquent pas, certains prenant même nos héros au dépourvu tant de nouvelles découvertes (les billets carbonisés) remettent en cause toute leur patiente construction mentale. Mais n'ayez crainte, les détectives résoudront le mystère, Ellery Queen insistant même, à la désolation de ses collègues, pour insérer son traditionnel « défi au lecteur ».
L'auteur, manifestement, connait son sujet et se révèle un passionné du roman d'énigme qui se désole, avec les réflexions de Queen, de la prédominance de la série noire. Il brosse en quelques phrases la personnalité des détectives, rend hommage aux auteurs européens, américains et japonais et défend l'universalité du whodunit. Les dialogues sont vifs et la confrontation entre les protagonistes aboutit à un ping-pong verbal réjouissant entrecoupés de nombreuses références aux enquêtes antérieures de nos héros. Attention, donc, les balises « spoilers » n'existent pas dans ce récit qui évoque, notamment, le dénouement de L'ARCHE DE NOÉ d'Ellery Queen, LE CRIME DE L'ORIENT EXPRESS d'Agatha Christie ou LA TÊTE D'UN HOMME de Simenon.
Après la résolution de l'énigme, bien pensée et dans la pure tradition de l'Age d'Or, le lecteur aura même droit à une ultime pirouette qui achève de faire de ce roman un divertissement cinq étoiles. Recommandé et même incontournable pour les amateurs !

Lien : http://hellrick.over-blog.co..
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