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Critique de Stockard


Quatorze ans maintenant que Larry Markham est revenu du Vietnam. On pourrait imaginer que le traumatisme, s'il est toujours présent, s'est émoussé avec le temps. Nada. Larry, c'est comme s'il était rentré hier. Et il n'est pas le seul dans cette situation. Pas de doute que les années auront beau se succéder et mettre de la distance avec cette sale guerre, aucun de ceux qui ont eu la veine de rentrer ne s'en remettra jamais vraiment.
Et pourtant, ils y aspirent tous à reprendre la vie qu'ils ont laissée en partant. Larry s'est dégoté un boulot dans la distribution de pâtisserie industrielle, il fournit les supermarchés, remplit les distributeurs etc., une tâche qui lui laisse le temps, trop, de penser : à son mariage qui bat de l'aile parce que sa femme a fini par se lasser de ses hurlements nocturnes et de son comportement souvent borderline, à son fils mentalement différent des autres garçons de son âge et surtout à son unité, là-bas, dans la jungle humide dont lui seul est revenu. Et, comme si ça ne suffisait pas à le tenir au bord du gouffre, voilà qu'un vétéran enfuit de l'hôpital militaire, où Larry encadre bénévolement un groupe de soldats invalides ou souffrant de SPT, sème la mort autour de lui avant de le prendre pour ultime cible, lui laissant entre temps l'amusement d'indices sous forme de cartes à jouer disséminées un peu partout (difficile de ne pas y voir un clin d'oeil à Koko de Peter Straub qui nous avait crée un peu le même genre d'ancien soldat-tueur traumatisé)

Mêlant histoire présente et souvenirs du passé, inextricablement liés entre eux, Stewart O'Nan, à qui je sens que je ne vais pas tarder à vouer un culte, nous raconte le Vietnam sans parti pris, sans pathos ni patriotisme, juste le quotidien de jeunes hommes largués dans une jungle hostile qui, entre celui qui se croit dans un jeu vidéo et n'imagine pas pouvoir se faire réellement tuer et le grand solitaire qui passe son temps à compter les jours qu'il lui reste avant de dégager de cet enfer, tentent juste de survivre avec cette omniprésente trouille au ventre et, pour la plupart sinon pour tous, pas la plus petite idée de ce qu'ils fichent là.

Le suspense amené avec le tueur forcené est lui aussi plutôt bien ficelé mais ne constitue en rien le point d'orgue de l'histoire. Plutôt voir ça comme une petite intrigue bonus mais aucun doute que l'essence du Nom des Morts reste la réflexion sur les guerres quelles qu'elles soient, les traumatismes qu'elles engendrent, les vies de milliers de soldats qu'elles foutent en l'air (mais étonnamment jamais celles de généraux qui font presque toujours de vieux os), les dommages collatéraux qu'elles produisent et la difficulté voire parfois (souvent ?) l'impossibilité de se reconstruire parce qu'on a beau essayer de toutes ses forces, rien ne repousse jamais sur ces absurdes champs d'honneur éclaboussés du sang des sacrifiés.

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