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Critique de Cigale17


Le mois prochain paraîtront chez Philippe Rey un recueil de nouvelles, Un (autre) toi, et un roman, Respire… de Joyce Carole Oates, une de mes autrices préférée, et c'est ce qui m'a décidé à enfin me lancer dans son précédent pavé : La nuit. le sommeil. La mort. Les étoiles. le titre de ce beau roman est tiré d'un poème de Walt Whitman dont un extrait est placé en exergue. le roman commence par un prologue violent : John Earle McClaren, surnommé Whitey, descend de sa voiture et intervient quand il constate que deux policiers blancs sont en train de tabasser violemment un jeune homme à la peau noire. Ils continuent à lui infliger des tirs de Taser alors que le pauvre ne proteste même plus. Les deux brutes se retournent contre Whitey et lui font subir un sort semblable. le jeune homme survivra, mais Whitey subit un AVC et sombre dans le coma. La première des cinq parties commence la veille de cette agression, en octobre 2010. L'histoire se terminera en janvier 2012. le séjour du père à l'hôpital est le prétexte pour présenter toute la famille.
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Jessalyn, l'épouse de Whitey, fait courageusement face bien qu'elle soit dévastée par les événements. Thom, l'aîné des enfants, presque 40 ans, directeur de l'entreprise fondée par son père, tente de prendre les choses en main. Beverly, l'aînée des filles, fébrile et fréquemment malveillante, se pose en victime. Loren, proviseure dans un lycée, joue les femmes fortes. Virgil, l'artiste, le rebelle, culpabilise et continue à chercher sa place. Sophia, la plus jeune, 28 ans, en adoration devant son père, commence par subir la situation. Tous mettaient Whitey sur un piédestal. Aucun, pas même Virgil, ne contestait son autorité de patriarche dont les qualités étaient reconnues et admirées tant dans sa famille que dans la communauté. La mort de Whitey va bouleverser l'ordre familial, révéler rancoeurs et jalousies, mettre au jour des aspects moins glorieux de la vie du père, faire sombrer certains des enfants et en libérer d'autres, pas ceux auxquels on s'attendait. Quant à Jessalyn... Elle est le personnage le plus fouillé, le plus attachant aussi, à mon avis. Dans la troisième partie, « Sans titre : veuve », on la voit recueillir un matou agressif et borgne, le contraire d'un animal domestique, geste qui marque un tournant dans la perception que Jessalyn a de son veuvage et d'elle-même.
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L'aspect autobiographique du roman est annoncé explicitement dans la dédicace : « À la mémoire de Charlie Gross, mon premier lecteur et mon mari bien-aimé. » le deuil, le chagrin et la dévastation qui l'accompagnent, la manière dont les proches sont affectés même par une mort prévisible constituent, je crois, le socle du roman. Cependant d'autres thèmes parcourent ce beau livre : le racisme de la société américaine, latent ou déclaré, les violences policières, les compromissions qui permettent d'étouffer le scandale, l'hypocrisie, la condescendance d'une classe sociale privilégiée, les relents d'homophobie, etc., autant de critiques plus ou moins ouvertement formulées. Même si le roman soufre de quelques longueurs, je l'ai lu avec passion et sans jamais m'ennuyer. Et je lirai le suivant, c'est sûr, je l'attends déjà !
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