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Critique de le_Bison


Et si je levais un peu les yeux de mon bouquin... regarder les cerisier pleurer, s'envoler ses larmes de fleurs...

Sentir le vent bousculer ma crinière ondoyante et voir s'emmêler quelques fleurs de cerisier venir atterrir dans mon verre de bière. Regarder ces fleurs si éphémères embellir les vies de promeneurs anonymes, de belles amoureuses ou de sombres et tristes solitaires. Comme un feu d'artifice floral qui illumine les jardins à l'ombre du zen et des temples. D'ailleurs, question temple, je me retrouve à Kamakura. Splendide ville où règne le Daibutsu de sa majestuosité, des vagues qui se déchirent sur ses falaises, et de longues marches d'escalier pour atteindre l'antre sereine des nombreux temples égrainés aux abords de la forêt.

Guider par quelques senteurs, animer par le plaisir d'un thé fleur de geisha, je découvre une papeterie que je n'avais jusqu'à présent jamais osé pénétrer. C'est que je suis timide et qu'il me faut du temps pour oser m'aventurer dans certains plaisirs de la vie. M'attabler à la terrasse, commander une bière, et la regarder, écrire, s'appliquer sur chaque syllabe calligraphiée, trouver le bon sens d'écriture, l'enveloppe adéquate, la qualité du papier, de l'encre, de la plume, surtout pas de critériums. Même le choix du timbre a son importance. Chaque chose a de la valeur dans la correspondance, même dans une lettre de rupture.

Qui y'a-t-il de plus beau dans la vie éphémère d'un pauvre type que d'entrapercevoir le kimono ouvert sur cette toison brune à part justement voir un cerisier pleurer de ses milles fleurs. La jeune et belle Hatoko, loin de mes fantasmes lubriques et mal perçus, reprend la papeterie de l'Aînée, sa grand-mère. Et par la même occasion se lance dans le métier, ô combien incongru en cette période 2.0, d'écrivaine publique. de cartes de voeux aux mots de rupture, de lettres d'amour au derniers mots d'un amour, elle y met tant d'âme, de beauté et de bonté dans chacun de ses gestes, dans chaque mot ou chaque kanji employé. Elle laisse surtout la lettre reposer une nuit auprès de l'autel sans cacheter l'enveloppe, la nuit étant le royaume des ancêtres, leurs conseils de bienveillance s'immisceront à l'intérieur.

« La Papeterie Tsubaki », c'est du bel ouvrage qui fait du bien à la vie, comme un bon verre de Nikka. Ou un verre de vin blanc accompagné de la personne choisie. Ou une bonne bière. Parce qu'au final, lorsque la papeterie tire son rideau, on boit pas mal dans ce roman d'Ito Ogawa dont les effluves maltées se mêlent harmonieusement avec celles d'un thé et d'une fleur de cerisier. Il y est question d'âme et de tristesse, de peine et d'amour, de moi et de Kamakura.

Merci. Infiniment.
Et si je reposais mes yeux vers mon verre de bière...
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