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Critique de Luniver


La pornographie est-elle morale ? Ce grand sujet philosophique est rarement abordé dans les discussions, puisque tout le monde est contre. Pourquoi donc Internet est-il rempli de sites que personne n'a jamais consultés, et pourquoi certains réalisateurs s'obstinent-ils à créer des films que personne ne regarde ? le mystère reste entier. En attendant, on peut toujours traiter le sujet initial, ne fut-ce qu'à titre de curiosité intellectuelle.

Premier point à signaler, l'ouvrage n'est pas neutre et généraliste. L'auteur explique clairement dans les premiers chapitres que son but est de réfuter les arguments du camp des « contre », qu'il juge contradictoires, mais cette précision n'est malheureusement pas indiquée sur la quatrième de couverture. Première déception pour moi, puisque je ne connais pas trop le débat, et découvrir des arguments par quelqu'un qui veut les combattre, ce n'est pas l'idéal !

La première partie de l'essai pourrait illustrer la phrase « Quand un philosophe me répond, je ne comprend plus ma question ». L'auteur passe en revue les différentes définitions de la pornographie pour montrer qu'elles sont toutes incohérentes, et variables selon l'époque (rappelons-nous que « Madame Bovary » a été attaqué pour outrage aux bonnes moeurs). Elles contiennent toutes un élément subjectif, car il s'agit de juger l'intention de l'auteur, celle du consommateur, ou les sentiments d'un non-consommateur exposé par accident à de telles oeuvres.

Dans un second temps, on s'attaque aux deux arguments modernes, qui ont remplacé les arguments moraux ou religieux devenus obsolètes de nos jours : la violence faite aux femmes et la protection des mineurs. Cette partie est un peu trop théorique à mon goût. Certes, on y parle de liberté de choix, on critique le paternalisme et le côté arbitraire des interdictions, mais pas vraiment des conséquences pratiques. L'auteur mentionne bien le côté partisan des études sur le sujet (les études commandées par des groupes « pornophobes » montrent que la pornographie est dangereuse, celles des « pornophiles » qu'elle est inoffensive), ou même l'incapacité de les réaliser (on imagine mal un groupe de sociologues obliger des jeunes adolescents à visionner du porno pour en conclure « ils sont tous traumatisés, nous recommandons l'interdiction ») mais on a quand même peu de concret à se mettre sous la dent.

Le gros point faible du livre reste que tous les arguments ne concernent que la consommation de la pornographie, mais on ne parle jamais de sa production. Pourtant, il me semble que c'est ce point qui concentre le plus de critiques : peut-on échanger une relation sexuelle contre de l'argent ? Et sans y répondre à cette question, le reste de l'argumentation ne repose plus sur grand chose car si la réponse est non, le visionnage récréatif de quelque chose d'immoral ne peut pas être moral.

L'essai ne m'a pas vraiment convaincu, je le trouve trop porté sur les pinaillages intellectuels, et pas assez imprégné des réalités du terrain.
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