Malgré lui, il repensa aux premiers temps avec Eva. Leur complicité, la vie de couple qu’ils avaient décidé de concrétiser. Il s’était parfois demandé s’il l’avait jamais aimée. Mais, oui, bien sûr qu’il l’avait aimée. Mais son amour avait poussé sur un sol terriblement malsain. Il avait confondu passion et attirance. Un mélange raté, pour ne pas dire catastrophique. Comme si on pouvait construire un amour pour la vie sur une passion physique. Comme si on pouvait garder intact le désir quand la fête se termine et que le quotidien reprend ses droits. Quand le corps qui était un pays magique devient un terrain de jeu trop familier.
Fredrika avançait d’un pas lent dans le couloir de la brigade criminelle. Son ventre proéminent ressemblait à un ballon de basket qui se serait égaré sous son pull. Ses seins avaient presque doublé de volume.
- On dirait les douces collines du sud de la France où l’on produit du si bon vin, avait commenté Spencer Lagergren, le père de l’enfant, quelques jours plus tôt.
D’un pas léger et le regard aux aguets, elle marcha dans le pré, humant le parfum des fleurs, sentant la caresse des feuilles contre ses jambes nues. Il fallait cueillir les fleurs en silence, sinon, ça ne marcherait pas, et il en fallait sept espèces différentes, choisies uniquement le soir de la Saint-Jean, pour être glissées ensuite sous l’oreiller. Si toutes les conditions étaient réunies, elle le verrait alors, l’homme avec qui elle se marierait. Du moins elle le croyait quand elle était petite et qu’elle avait cueilli des fleurs à la Saint-Jean pour la première fois.
Sans un mot de remerciement, elle prit l'anneau et le regarda jusqu'à ce que les souvenirs remontent avec une telle force qu'elle fondit en larmes. En levant les yeux vers l'homme qui affirmait être un policier suédois, elle vit que lui aussi pleurait.
Il ne savait pas exactement qui maudire pour son infortune. ses parents qui l'avaient mis au monde dans un pays comme l'Irak? Ou le président américain que tout le monde aimait haïr , qui avait abattu le grand leader Saddam avent de trahir le peuple quand le pays s'était effondré?
Sans se presser, il se leva avec sa tasse de café et la posa bien en évidence sur le plan de travail alors que le lave-vaisselle était ouvert et qu'une pancarte rouge, pour rappeler aux récalcitrants qu'ils devaient ranger eux-mêmes, indiquait : "Ta mère ne travaille pas ici."
L'absence de bruit peut-être une bénédiction, mais aussi une condamnation.
Chaque fois qu'il travaillait sur des écoutes téléphoniques, il était fasciné par le nombre de coups de fil que les gens passaient chaque jour.
Il ne savait pas vraiment qui maudire pour l'infortune. Ses parents qui l'avaient mis au monde dans un pays comme l'Irak ? Ou le président américain que tout le monde aimait haïr, qui avait abattu le grand leader Saddam, avant de trahir le peuple quand le pays s'était effondré ? Ou encore l'Europe, qui refusait de le laisser entrer,.....
Les fleurs qu'elle tenait la piquèrent un peu quand elle les serra dans sa main. Il ne lui en manquait plus qu'une. Une pâquerette. La fleur que son père appelait une "mauvaise herbe sophistiquée".