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Critique de PhilippeCastellain


Je me suis toujours demandé ce qui se passait dans la tête des soldats japonais ayant continué le combat parfois longtemps après la fin de la seconde guerre mondiale. Quoi de mieux pour le découvrir que les mémoires de Hiro Onoda, qui se rendit en… 1974 !!

Les premières pages sont perturbantes : on y découvre un jeune loup aux dents longues parti travailler en Chine, et passant toutes ses soirées dans les dancings de la concession européenne ! Mobilisé en 1942, il rejoint une école d'officier, puis est envoyé quelques mois dans un centre de formation à la guérilla. Fin 1944, il est affecté aux Philippines. Son commandant l'envoie sur la petite île de Lubang, avec une unique consigne : faire de son mieux pour embêter les Américains jusqu'au retour de l'armée japonaise…

Il a donc exécuté ses ordres pendant trente ans. Avec trois hommes. Puis deux. Puis un. Puis, les deux dernières années, seul. Quand on leur a annoncé que la guerre était perdue, ils ont considéré qu'il s'agissait d'une ruse des Américains. On leur a parachuté des tracts, des journaux, des photos de leurs familles même : nouvelles ruses. Son frère est venu, a diffusé un message par haut-parleurs : encore une ruse. Très fort ces Américains, décidément. Il ne rentrait tout simplement pas dans son cadre de pensée que le Japon puisse perdre la guerre. Plus fort encore : s'il y avait encore un Japon et des japonais, c'est que la guerre était toujours en cours ; s'ils l'avaient perdu ils seraient tous morts. Peu à peu, il se construisit un monde imaginaire pour expliquer les évolutions qu'il observait : le Japon s'était allié avec les communistes en Chine, conflit militaire et guerre économique étaient maintenant dissociés… le 9 mars 1974, quand son ancien colonel lui annonça qu'ils avaient bel et bien perdu la guerre, son univers s'écroula.

En fait, son point de vue semble si banal dans le Japon de 1940 que tout ce qu'on se demande, c'est : pourquoi n'y a-t-il pas plus de gars qui ont fait comme lui ? La réponse est simple : son entrainement à la guérilla. Contrairement à 99% des officiers japonais, il n'avait pas été formé à mourir glorieusement à la tête de ses troupes mais à survivre quoi qu'il arrive. Puis, la chance voulut que l'un des trois hommes qui l'accompagnaient soit rompu à la survie dans la nature.

En revanche, qu'on ne s'attende pas à un récit exaltant. Tout est raconté avec une sobriété et une simplicité typiquement japonaise. Il a fait ce qu'il estimait être son devoir, et voila tout. Il fallait surtout trouver à manger et ne pas tomber malade. Point. Leurs actions de guérilla étaient des plus modestes, même s'ils ont visiblement bien pourri la vie des paysans de Lubang pendant trente ans. A sa sortie de la jungle, il sera d'ailleurs étonné qu'ils ne lui en veulent pas plus.
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