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Critique de Sofiert


Avant tout, une écriture.
La langue, poétique, intense et sombre de Makenzy Orcell est magnifique. Cette manière d'écrire dans un flux ininterrompu de pensées tout en servant la narration peut soit emporter le lecteur dans une quasi apnée, soit le perturber au point qu'il renonce à la lecture.
Car le rythme est effréné, de virgules en points de suspension, il faut parfois lever la tête pour reprendre son souffle. Mais la poésie de l'écriture ne s'interrompt jamais, qu'elle soit désespérée, ironique, crue ou sensuelle.

Et puis une voix de femme, juste et percutante, qui nous raconte son histoire après qu'elle se soit suicidée dans le métro parisien.
Parce qu'en nous quittant, elle déclare qu'"à partir de la mort tout recommence".
C'est l'histoire ordinaire d'une femme ordinaire qui n'a pas eu de chance, mais très vite cette histoire devient universelle.

Elle est née dans une famille bourgeoise dans un petit village du sud de la France d'une mère aigrie et incapable d'aimer et d'un père effacé devant son frère aîné. Elle grandit en décalage, incapable de feindre devant la médiocrité ambiante et victime d'un viol de la part de son oncle, viol que l'entourage refuse de reconnaître.
"… figurez-vous qu'un jour elle m'avait demandé, oui celle qui m'avait mise au monde, rappelle-moi ton nom déjà, on aurait dit que le seul moyen d'apaiser les frustrations de sa vie conjugale était de m'étouffer, me réduire en miettes, me faire perdre toute confiance en moi-même, plus tard, seule à seule dans la cuisine par exemple, elle me traitait de sauvage, de petite conne, ton oncle il a beaucoup d'affection pour toi, il t'aime, mais toi tu n'as aucun respect pour lui, pour personne d'ailleurs, tu n'as donc aucune limite, elle me parlait ainsi pour que je me sente ridicule, mais ce n'était pas le cas, c'est au frère de père qu'elle aurait dû s'en prendre, je n'avais rien fait, sinon être une jeune adolescente sous les projecteurs d'un vieux dégoûtant, j'avais du mal à imaginer qu'elle n'avait rien compris, ou qu'elle faisait semblant, quel oncle serre sa nièce aussi fort et aussi longtemps dans ses bras, quel parent assiste à ça sans se demander ce qui se passe et redoubler de vigilance "
Elle fuit à Paris pour ses études qu'elle abandonne rapidement, galère en faisant du slam puis rencontre Orcel ( un double positif de l'auteur) qui sera tué dans les attentats du Bataclan. Elle tombe alors sous l'emprise de Makenzy ( le double négatif ) qui la trompe, la méprise et l'humilie jusqu'à fuir le jour du mariage.

L'auteur a adopté le point de vue féminin avec une vraie sensibilité qui nous laisse présumer de son empathie pour l'humanité toute entière. Il fait défiler la vie de cette femme qui, dans sa quête éperdue de l'amour qu'elle n'a jamais connu, dans sa volonté de repousser l'agression dont elle a été victime, fait les mauvais choix et se laisse maltraiter par la vie.

Tout en étant fascinée par l'écriture de Makenzy Orcel, et par l'ambition de son roman, je dois cependant avouer avoir parfois décroché sur la longueur, ce qui explique les 4 étoiles.
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