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Critique de Alzie


Alzie
06 décembre 2014
Visite de Paris sans dessus-dessous et sur les chapeaux de roues.

A l'aise partout Zazie, sur le papier (Raymond Queneau,1959) comme au cinéma (Louis Malle, 1960) et maintenant dans la BD. Autant dire qu'ici comme ailleurs elle fait tout ce qu'elle veut ou presque, Zazie, enfin dans les limites imposées par la transposition ; reprise en toute fidélité d'une narration sans répit où la très courte durée donne tout son sel à ce voyage éclair d'une petite provinciale délurée, à Paris. Pour cause de grève à la RATP, Zazie qui veut pourtant monter dans le métro à tout prix, doit se contenter d'un taxi et va se payer une bande d'adultes quelques heures durant.

"DOUKIPUDONKTAN" s'interroge tonton Gabriel, parfumé au barbouze de chez Fior, en ouverture. Zazie lui est remise en mains propres à la gare de Lyon et sera rendue avec les mains plus sales au même endroit, quarante-huit heures et de nombreuses péripéties plus tard ; c'est le seul principe directeur tangible de cette histoire qui plonge ses racines dans un univers loufoque et chaotique où Raymond Queneau glisse les fantaisies langagières d'une écriture en liberté. le roman parlé trouve ici une formulation dessinée plutôt savoureuse qui lui convient assez. Malice, tendresse et cruauté.

Irrésistible par le trait de Clément Oubrerie, Zazie est cette petite peste rousse avec laquelle personne ne passerait sans doute plus d'un quart d'heure sans avoir envie de l'étriper. Elle nous fait cependant bien marrer du haut de ses trois crêpes, quand elle nargue les adultes, poings sur les hanches et bras croisés, l'oreille collée à la porte ou l'oeil rivé au trou de la serrure, intéressée qu'elle est par la "sessualité" et surtout "l'hormosessualité". Et que dire des adultes qui l'entourent d'ailleurs ? Tribu hétéroclite très ordinaire mais complètement déjantée, que la gamine très avertie, en habituée des boyaux, élevée entre la hache et le saucisson, n'aura pas de mal à charcuter. Ses péremptoires "mon cul" signalent à la compagnie que pour "faire chier" elle s'y entend, Zazie ; Tonton Gabriel et tata Marceline, Turandot, le duo à lunettes du cordonnier Gridoux et de Pedro-surplus, monsieur Charles, Mado, la baronne Mouaque et Trouscaillon n'ont plus qu'à bien se tenir.

Si le langage peu châtié de Zazie n'a plus de quoi surprendre aujourd'hui, son aptitude à débusquer le ridicule d'adultes en mal de prêt à penser, à se poser devant eux en égale, à déjouer leurs complots ou imposer les siens - gaulée pour les sports de combat plutôt que pour le tutu - est toujours d'une corrosive actualité. Bravant les lois de la psychologie enfantine la plus élémentaire, elle ruse sans retenue, et pour notre plus grand plaisir, avec l'ordinaire qui règle le plus souvent les relations d'adultes avec les enfants : autoritarisme, mauvaise foi, subterfuges. Rien ne l'effraie Zazie.

Et si la fin est connue d'avance, la chute finale n'en est que plus jolie.
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