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Critique de nadejda


« Le chapiteau vert » débute en 1953 alors que va survenir la mort de Staline et va nous faire traverser toutes les années 1960, 1970 jusqu'à la chute du communisme et la mort du poète Brodsky en 1996.
C'est le roman de la dissidence, de tous ceux qui ont eu le courage de diffuser sous le manteau et en les faisant passer à l'étranger, les livrets des samizdat mais aussi une description de la triste réalité d'une société basée sur la peur et le mensonge qui fait naître trahison et délation.

La couverture de ce livre symbolise parfaitement son contenu. Ces rails qui forment un arbre, qui se croisent, bifurquent, et dont on peut penser qu'elles puissent se rejoindre ou pas, selon les caprices du destin, correspondent aux liens qui unissent au départ trois amis d'enfance, Ilya, Sania, Micha, des liens qui vont se distendre parfois face à l'adversité. Chacun va suivre sa propre voie : Ilya sera photographe, Micha, le poète, fou de livres sera un temps professeur dans un institut d'enfants sourds et Sania qui voulait être pianiste, musicologue. Mais leur amitié ne sera pas rompue.

p 18 il s'était produit quelque chose d'important. Un attachement aussi solide entre des êtres ne peut naître que dans l'adolescence. le crochet s'enfonce alors en plein coeur, et le fil qui unit des gens liés par une amitié d'enfance dure toute la vie, sans jamais se rompre.

p 399 Sania, qui était allé voir Aliona dès qu'il avait appris l'arrestation de Micha, lui rendait à présent visite tous les jours. Les années de refroidissement dans ses relations avec Micha avaient été comme effacées d'un coup de gomme. Il s'avéra que leur amitié était toujours vivante et fraîche, et n'avait aucun besoin d'être dopée à l'aide de fréquentes conversations téléphoniques, de confidences mutuelles et de bières avalées ensemble.


Si ces rails sont parfois ceux que peuvent emprunter les trains qui mènent à l'exil ou vers les camps… ils peuvent aussi favoriser des rencontres nouvelles entre des êtres que rien ne prédisposaient à se connaître.

Et puis vaille que vaille, la vie quotidienne suit son cours et la vie reste souvent joyeuse avec ses réunions entre amis où l'on boit beaucoup de thé et de vodka, où les discussions se prolongent tard dans la nuit, où la poésie et la musique sont reines.

Et comme le dit, à Micha, Anna Alexandrovna la mère de Sania, qui avait, elle-aussi, traversé des années noires : « Tu sais, Micha, tout ce qu'il y a de nouveau ici-bas est vieux comme le monde. Mon mari a été envoyé en prison par son propre frère. Ils ont péri tous les deux. C'est le destin qui décide et non notre conduite, qu'elle soit bonne ou mauvaise. Mange, s'il te plait. »

Ce roman touffu où les personnages réels ou inspirés par des personnes que Ludmila Oulitskaia a pu rencontrer abondent, est un roman où l'on prend plaisir à s'enfoncer et que l'on se délecte à lire lentement.

Après la longue liste des remerciements de l'auteure à tous ceux qui ont soutenu l'écriture de son roman elle conclut : 
« Avec ma gratitude, à la mémoire de tous les gens réels aujourd'hui disparus qui se tenaient derrière mes personnages, ceux qui ont été irréprochables et ceux qui ont trébuché en ces temps meurtriers, ceux qui ont tenu bon et ceux qui n'y sont pas parvenus, les témoins, les héros et les victimes, dont le souvenir restera pour les siècles des siècles. »
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