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Critique de Nicolas9


Ce livre s'adresse notamment à tous ceux qui envisagent d'avoir une fois recours à un psychologue ainsi qu'à ceux qui ont sauté le pas, mais qui ont été déçus, voire dégoutés par l'expérience.

En effet, Scott Peck sait de quoi il parle. Psychiatre sur la côte nord-est des États-Unis, il a accueilli dans son cabinet des centaines d'adultes issus majoritairement de la frange aisée et éduquée du Connecticut.

Il explique avec humour et honnêteté sa vision du rôle de « réparateur des âmes » en recourant toujours, et c'est la force de cet opus, à des exemples concrets de thérapies menées à bien.

Son livre se divise en 4 parties, à mon avis indissociables : la discipline, l'amour, la religion et la grâce.

Pour Peck, un minimum d'autodiscipline est presque un prérequis pour celui qui désire réussir la revitalisation de son être profond. Cette valeur se traduit par la capacité de dire la vérité au soignant et de lui faire entièrement confiance. Car mentir aux autres, c'est aussi mentir à soi-même, d'où l'importance d'assumer ses pensées et ses actes en toutes circonstances. Cela implique notamment le désir de se débarrasser du vieux filtre mental, développé dans le passé, pour en recréer un nouveau plus adapté à l'existence que nous souhaitons avoir à l'avenir. Avec une caméra noir-blanc, impossible de voir toutes les nuances de couleurs qu'offre la vie.

Quant à l'amour, il s'agit d'un acte de volonté. L'auteur en profite pour démonter le mythe du romantisme qui, selon lui, n'est guère plus qu'une attirance instinctive et hormonale pour un autre être... Dès que celle-ci cesse, la passion s'évapore. Non, le vrai amour c'est celui qui nous pousse à vouloir le développement spirituel et psychologique de l'autre, quelles qu'en soient les conséquences. Autrement dit, une relation sentimentale basée sur la domination ou le chantage affectif n'en est pas un, c'est de l'appropriation illégitime !

Tertio, la religion qui constitue peut-être l'aspect le moins familier pour un Européen nourri au lait de la laïcité. Mais, attention, si on élargi cette notion au champ plus vaste de nos croyances profondes (en la politique, l'argent, l'écologie, la science...), alors on s'aperçoit du profit à tirer des réflexions peckiennes. « A court terme, c'est plus confortable de rester où nous sommes, d'éviter la souffrance que cause la mort de nos chères vieilles idées. Or, la route de l'évolution spirituelle part dans la direction opposée. Il faut commencer par douter de ce que nous croyons et chercher activement ce qui est inquiétant et inconnu » !

Et de poursuivre : « Il n'existe pas de bonne religion héréditaire. Pour vivre pleinement, il est indispensable que notre religion soit complètement personnelle, entièrement forgée par nos doutes et la remise en question de notre propre expérience de la réalité » (p. 221).

Last but not least, la grâce. C'est apparemment ce chapitre qui a conduit l'éditeur Random House à refuser le manuscrit de celui qui était à l'époque un illustre inconnu du paysage intellectuel new-yorkais. Au point que Peck édita finalement 5'000 exemplaires de son livre à compte d'auteur. Ça n'est que six ans plus tard que l'oeuvre devint un best-seller.

Mais revenons-en au contenu de cette partie. En s'appuyant encore une fois sur son expérience, le psychiatre remarque que la croyance au scientisme et au matérialisme finit à terme par s'avérer un cul-de-sac de la pensée menant à la désillusion et au cynisme destructeur. C'est tout le contraire de la grâce, au sens religieux et philosophique du terme, qui par son côté malléable et par définition insaisissable permet d'atteindre un niveau gratifiant d'évolution spirituelle. « Ceux qui ont atteint ce stade, note Peck, savent que leur conscience vient de l'inconscient. » Ce dernier constitue une sorte de rhizome de l'intelligence universelle auquel ceux qui ont pris le temps de méditer arrivent à se connecter. « Si on leur demande d'où viennent leur savoir et leur pouvoir, ils répondront :
- Cela ne m'appartient pas. Ce n'est que l'expression infime d'un pouvoir beaucoup plus vaste. Je ne suis qu'un transmetteur » (p. 329).

Or, « malgré la joie qui l'accompagne, l'expérience du pouvoir spirituel est aussi effrayante (...) C'est facile d'agir avec une conscience limitée et d'ignorer les conséquences. Mais, plus notre conscience augmente, plus elle a d'éléments avec lesquels elle doit compter pour prendre des décisions. Et, plus on sait, plus les décisions sont complexes (...) le pouvoir spirituel n'est donc pas uniquement être conscient : c'est aussi la capacité de prendre des décisions avec toujours plus de conscience » (p. 330).

Pour conclure, ce compte-rendu ne saurait rendre compte de la profondeur et de la largeur des idées abordées dans ce livre édité pour la première fois en 1978 ! Mais, ce qui prouve sa valeur c'est que son contenu ne paraît pas avoir pris une ride en quarante ans. La technique a certes beaucoup évolué depuis, mais la nature humaine et les questions existentielles qui l'accompagnent sont restées les mêmes, car elles semblent échapper à l'espace et au temps...
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