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Critique de magalibertrand


Lettres à Clipperton n'est pas un roman épistolaire comme les autres. À laisser courir son imagination entre un titre aux sonorités anglo-saxonnes et une couverture azuréenne ornée de désuètes enveloppes « Par avion » (que, soit dit en passant, les moins de vingt ans…gnagnagna), on pourrait fort benoitement tomber dans le piège d'une histoire vaguement délavée à l'eau de rose, écrite d'une plume piquante et narrant les amours aux longs cours d'une prude jeune fille avec un aventurier d'outre- quelque chose. Eh bien non, pas du tout, car si, comme le souffle le sous-titre de cet intrigant ouvrage, il y a bien « aventure littéraire », elle est d'un tout autre ordre, bien plus original voire déstabilisant, où le hasard et la poésie du geste ont toute leur part.
Que faire, lorsque l'on se retrouve en possession d'une pile d'enveloppes « par avion » sans usage déterminé, que l'on est écrivain (écri…vaine ?) et que l'on a suffisamment d'imagination et d'audace pour se lancer un défi plein de sel, de folie et d'une forme de désintéressement propre aux rêveurs ? On achète un crayon « écrit sur tout », on le taille à l'ancienne, au canif, et on se choisit un lointain et mystérieux destinataire, histoire d'aiguiser dans le même temps sa curiosité et son imagination. le destinataire sera « Tout résident » de « La Passion- Clipperton », petit point français suspendu en plein Pacifique Nord, à peine un confetti troué en son milieu, où grouillent des milliers de crabes copieusement arrosés du guano nourricier des goélands locaux. Bref, « une île entre le ciel et l'eau, une île sans âme ni bateau », un caillou inhospitalier dont on se demande bien ce qu'il a pu passer entre les deux oreilles des colonisateurs de tous poils pour qu'ils veuillent à toute force y planter leur drapeau !
C'est ce qu'Irma Pelatan, du bout de son crayon de bois et au rythme d'une lettre par jour va nous amener peu à peu à découvrir, tricotant à son quotidien de navigatrice de plaisance la vie et l'histoire de ce lointain atoll témoin et victime de tergiversations aussi ahurissantes qu'internationales. Songer que des hommes et des femmes ont pu tenter d'y vivre en échappant à la mort et à la folie, que des enfants ont pu y voir le jour et des intérêts purement économiques y être défendus confine à la sidération.
Irma Pelatan a su trouver le ton juste pour se plier à cet exercice de monologue épistolaire qu'elle s'était imposé à elle-même, adoptant le style légèrement emprunté et teinté d'une élégance surannée que le lecteur amateur du genre aura plaisir à retrouver entre ses lignes. C'est lui qui m'aura permis de tenir le cap tout au long de ma lecture et de ne pas me laisser arrêter par le passage sans grand relief qui m'a semblé couper en deux ce curieux roman qui n'en est pas vraiment un mais offre un plaisant voyage entre Histoire, imagination et réalité.

Lien : https://magali.bertrand@neuf..
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