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Critique de Profdoc16000


De la tragédie à l'état pur ! Régis Penet réussit de façon magistrale à instiller le tragique partout dans ses planches : certaines compositions sont à couper le souffle (comme au début avec les deux frères morts comme enlacés, trois cases verticales étroites, un gros plan sur le visage des soeurs, une vue de très haut en plongée avec les piliers du palais, magnifique), les personnages semblent parfois comme figés dans des poses et des gestes très expressifs (présence significative des mains : accusatrices, résolues, fraternelles, suppliantes... il faudrait en faire une étude !).

Il y a aussi un peu du roman-photo parfois, avec ces personnages aux traits réalistes (Ismène notamment, à qui Régis Penet a donné un visage très... américain je trouve) tourmentés par de grandes passions, échangeant des dialogues intenses dans de grands gestes. Cela crée parfois une dissonance avec la grandeur et la distinction de la tragédie, un mélange qui transforme ces héros en piètres comédiens un peu ridicules (comme nous apparaît le roman-photo dans sa version bas de gamme et souvent moquée). Une proposition intéressante.

A l'inverse, les personnages sont parfois dessinés avec des contours flous, leur peau devient diaphane, leur visage est lisse... Ainsi Antigone et Hémon sont-ils figés dans une pose éternelle, comme des statues.

L'auteur a fait le choix d'intégrer le choeur au récit. Il apparaît en pleine page à plusieurs reprises et s'adresse aux personnages.

Toute la bande dessinée se distingue par un choix de couleurs sépia (marron, ocres, rouge, beige...) et un grain notable. Les décors sont sobres, on voit seulement des grands voilages, des statues de dieux et déesses, des marches, un trône. Et les masques mortuaires d'Antigone, un motif qui revient tout au long du livre.

La couleur s'invite curieusement à la fin, lors de la mort d'Antigone, avec ce vert de la pelouse et des arbres, ou le rouge des anémones. L'eau de la rivière qui s'écoule lentement des rochers. Un retour paradoxal à la vie, au calme apparent, et la conclusion de Tirésias : "La vie est un perpétuel grondement que seules les grandes âmes parviennent à entendre."
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