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Critique de Dombrow01


Ce livre me laisse perplexe : à lire Gilles Perrault, Trepper est un génie, mais j'ai cherché d'autres informations sur lui et j'ai vu que les avis divergent. Certains historiens l'accusent d'avoir livré des membres de son réseau de d'être un imposteur. Perrault lui-même fournit certaines explications en disant bien que ce sont des hypothèses.

Pour en revenir au livre, il est extrêmement détaillé, l'auteur a fait un travail de recherche formidable pour écrire cet ouvrage. Mais ça a un inconvénient, c'est qu'on se perd dans les détails et la lecture devient fastidieuse. J'ai lu certaines parties en diagonale pour ne pas me noyer dans les détails. Je lui reproche aussi un manque de clarté parfois, lorsqu'on lit un témoignage sans être certain de qui parle.

On apprend beaucoup à la lecture de ce livre. Sur la vie de Léopold Trepper bien sûr, mais pas seulement. On y voit le fonctionnement d'un réseau d'espionnage en général, les méthodes utilisées pour le codage des messages, la fixation des rendez-vous clandestins, toute la vie quotidienne des agents vivant en milieu hostile.
On découvre aussi le fonctionnement du contre-espionnage allemand, l'Abwehr. J'ai été surpris de voir qu'ils interrogeaient leurs prisonniers en douceur (au contraire des brutes de la Gestapo), pas seulement par humanité, mais parce que leur but était de les retourner et de les utiliser pour communiquer de fausses informations à leurs correspondants étrangers. le prisonnier acceptait souvent pour éviter d'être torturé, et essayait à son tour de doubler ses adversaires en laissant un message subliminal qui indiquait qu'il écrivait sous la contrainte. En fait c'était un jeu de dupes auquel se livraient les services ennemis, chacun essayant d'intoxiquer l'autre.

Mais c'est encore plus compliqué : l'Abwehr explique à Trepper, qui en est bien conscient, que s'il fait savoir aux Russes qu'il est prisonnier, il sera condamné à mort par Moscou. Et oui, on découvre aussi la cruauté de la politique soviétique envers ses propres fidèles, résultat d'un pays vivant dans la paranoïa de son leader et la mémoire récente des purges staliniennes. Ne pas oublier que tous les soldats Russes faits prisonniers par les Allemands ont été envoyés au Gulag à leur retour.
Pour continuer dans ces conditions, Trepper devait être vraiment motivé, d'autant plus que certains de ses messages n'étaient pas pris au sérieux par les Russes. Ainsi l'annonce de l'invasion imminente de l'URSS (opération Barbarosa) avait été prévue par Trepper et d'autres espions en poste à l'étranger, mais Staline n'en a absolument pas tenu compte.

Pour complexifier encore le tout, on ajoute la rivalité entre les différents services allemands, Abwehr et Gestapo principalement, ainsi que l'idée que l'Allemagne ne pouvait s'en sortir sur deux fronts, et qu'il lui fallait faire la paix sur l'un d'entre eux. Les Soviétiques avaient peur que Hitler fasse la paix à l'Ouest pour envoyer toutes leurs forces sur eux, et les Anglais avaient peur d'une paix séparée entre les anciens partenaires du pacte germano-soviétique. Quant aux Allemands, ils commençaient à sentir le vent en train de tourner, et certains pensaient à leur avenir personnel.

Une fois prisonnier, Trepper doit tenir compte de toutes ces données pour envoyer les messages qui conviennent à Moscou, tout en faisant croire à ses geôliers que ces mêmes messages servaient leur cause.

A la fin de la guerre Trepper regagne l'URSS où il fût envoyé dans la sinistre prison de la Loubianka. On le libéra au bout de dix ans en lui disant qu'on n'avait rien à lui reprocher. Cette injustice fait dire à Gilles Perrault que "Il fut d'entre tous celui qui paya le prix le plus lourd, celui qui fut blessé par les siens quand les autres n'avaient été tués que par l'ennemi."
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