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Critique de AMR_La_Pirate


Quand Babelio m'a sollicitée pour cette opération Masse critique privilégiée, la présentation de la Femme périphérique de Sophie Pointurier, premier roman publié dans la collection « Traversée » chez Harper Collins, m'a immédiatement intriguée… Je lis beaucoup ; parfois la mémoire peut jouer des tours mais, là, cela me rappelait vraiment quelque chose… Quelques jours ont passé, j'ai reçu le livre, relu la quatrième de couverture avec toujours un sentiment de déjà lu, puis posé le livre sur le dessus de mes PAL urgentes, délai de trente jours oblige.
Dès les premiers mots, la mémoire m'est entièrement revenu et j'ai reconnu La RDA, Peter et moi de Gari Kouderc que Librinova m'avait confié en juillet 2020 pour un Service de Presse ; un peu submergée par ce type de demandes, je n'avais lu ce roman qu'en avril-mai 2021… Quelques recherches m'ont rapidement rassurée : j'avais bien sous les yeux le même roman et, en filigrane, deux facettes de la personnalité de son auteur.
Je vais donc me borner à réactualiser mon billet enthousiaste d'il y a quelques mois…

Un couple mythique, véritable référence dans le monde de l'art contemporain : Peter, un artiste maudit, transfuge de la RDA, et Petra, la parfaite icône de l'Allemagne de l'ouest…
Pour un éditeur parisien, le parcours de Peter et Petra Wolf représente un sujet rêvé de biographie à succès. Encore faudrait-il que les principaux intéressés coopèrent… Mais Petra n'est vraiment pas d'un abord facile et se terre dans un silence déterminé, ce qui n'aide pas le travail de recherche et nuit davantage à son image, tandis que Peter, en proie semble-t-il a une véritable phobie sociale, reste un mystère. Tout le monde a beau en parler, personne ne l'a vu depuis des années : c'est un peu l'histoire de l'homme qui a vu l'homme qui finalement n'a pas vu grand-chose…
Policiers, universitaires, galeristes, tous se lancent dans une course poursuite folle pour retrouver l'artiste allemand. Où est-il passé ? Et pourquoi ?

J'ai bien aimé la mise en lumière des problématiques sur l'art, sur la représentation figurative ou abstraite, sur l'art politique, sur la vague nostalgique du plastique est-allemand… Dépayser le lecteur en RDA permet d'aborder les notions d'art officiel et de liberté de l'art.
Il y a un réel décalage entre une période historique complexe, du moins pour moi qui ne connaît que les grandes lignes de la division de l'Allemagne et qui garde surtout en mémoire le souvenir de la chute du mur de Berlin en 1989, et l'époque contemporaine du récit avec, notamment, l'emballement des réseaux sociaux, la force des tweets qui font le buzz, les informations non vérifiées, une forme de transversalité qui permet de montrer une volonté d'ouverture d'esprit en parlant de ce que l'on ne connaît pas…
Pour ce qui est du mystère qui entoure le couple Wolf, j'étais un peu plus sur la défensive, espérant vraiment être surprise par le secret manifeste entourant le personnage de Peter, l'éternel absent autour de qui tout le récit est organisé. Finalement, si le mystère peut paraître cousu de fil blanc, c'est ce qu'il implique qui devient la clef de l'intrigue, à savoir le questionnement ouvert sur la représentativité des femmes dans le monde de l'art, la misogynie et le conservatisme du milieu.
Et puis, le dénouement m'a beaucoup plu, pas si annoncé que cela, en fait !

Sophie Pointurier a une belle plume, fluide, efficace.
Une rapide relecture n'a pas mis en évidence de grands bouleversements entre les deux versions : les titres de chapitre ont disparu, les transitions ont été modifiées (améliorées ?), la narration a été délibérément inscrite dans un écrin temporel autour de deux épigraphes jumelles… Je ne suis pas là pour porter un jugement sur l'éventuelle réécriture ou les corrections éditoriales… le titre actuel insiste davantage sur la place ambiguë des femmes dans un milieu qui reste misogyne et macho.
J'ai noté un certain humour dans le choix des noms des personnages : Philippe Museau, travaillant pour les Éditions Lézard de Minuit, par exemple…
La narration omnisciente passe d'un point de vue à l'autre, autour des personnages qui recherchent Peter, de leurs motivations, de Petra et du trio de femmes qui connaissent la vérité : c'est vivant et polyphonique, captivant. Les dialogues sonnent juste tout en étant percutants, souvent pleins d'humour. Les situations décrites ajoutent à l'impression de décalage ; je pense notamment aux moyens et aux infrastructures disproportionnés des Américains, véritable machine de guerre face à la petite maison d'édition française, sans budget et sa petite équipe de deux bras et demi …
Les personnages sont travaillés, des principaux aux plus secondaires, et l'auteur évite la facilité des grosses caricatures. Les psychologies sont complexes, surtout dans le monde du journalisme et des musées.

Ce roman, toutes versions confondues, demeure une excellente surprise ! Il tient ses promesses et plus encore.

Lien : https://www.facebook.com/pir..
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