Femme portant un fusil - Sophie Pointurier
On reproche aux révolutions de couper des têtes, mais c’est oublier ceux qui crèvent en silence pendant que rien ne change.
Pendant des siècles, les béguines ont su se frayer un chemin entre vie laïque, travail rétribué et vie mystique, où leur engagement était révocable. Ce statut, créé sur mesure, par elles-mêmes et pour elles-mêmes, leur avait permis de contourner l’obéissance pendant des siècles. Ni mariées, ni religieuses, ni soumises. Juste : tranquilles.
Il n’y a rien de pire au monde que passer pour une femme qui déteste les hommes. On peut être raciste, antisémite, violeur ou bouffeur de bébés que les hommes nous le pardonneraient mieux qu’une suspicion de misandrie.
On touchait du doigt la définition du gros œuvre : il y avait beaucoup de boulot, du sol au plafond, jusqu’aux fondations. La métaphore parfaite de mon état intérieur. Forcément, ça m’a parlé.
On pense que les adultes décident pour leurs enfants, mais lorsqu’ils grandissent tout se répond.
Une pensée m’obsède. À savoir comment, et par quelle magie, l’espèce humaine continue-t-elle de perdurer sachant ce qu’endure sa propre moitié ? Avec la misogynie décomplexée qui se répand depuis la nuit des temps, c’est un miracle que cette deuxième moitié du monde ne se soit toujours pas réveillée en rage, consciente de sa blessure collective.
Les lendemains de mort ne devraient jamais être soumis à la même routine, le jour devrait attendre avant de se lever, il devrait y avoir un silence, un changement dans notre respiration collective. Ce serait la moindre des choses.
L’aventure, quand elle est collective, n’appartient par définition plus à personne. Elle émerge et puise au hasard des désirs et des névroses de chacun.
Pourquoi parle-t-on autant de bite aux femmes ? C’était une question à laquelle la force de notre collectif ne trouvait pas de réponse nouvelle. L’obsession phallique nous horrifiait autant que l’absence de modération. Mais qu’avaient-ils tous avec leur sexe ?
Nous sommes en 1990, à l'apogée de la carrière d'un couple de plasticiens. Leur œuvre commune va écrire le parcours atypique de ces deux artistes, symbole des unions et désunions de l'Allemagne. Peter, l'homme de l'Est, artiste entier et passionné dont la portée créatrice emportera tout sur son passage, et Petra, la femme de l'Ouest, technicienne et gardienne du temple, vecteur indispensable de leur œuvre.