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Citations sur Les dessins et les jours - 'L'architecture commence a.. (10)

(Maintenant) la structure est souvent recouverte par plusieurs peaux isolantes et protectrices. Ces peaux nécessitent le calepinage de panneaux; le choix d'innombrables solutions de revêtements et de vitrages se présente. Des choix qui impliquent des décisions esthétiquesau sujet de la transparence, de la brillance, des reflets ou de la matité des volumes, de leur couleurs. Des choix typiquement "ornementaux".Pour arriver à une pureté calme, il faut parfois recouvrir, créer des lignes unificatrices, mentir. Chercher à épurer l'espace c'est souvent le carrosser.
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Je suis convaincu que le public sans le dire ou le savoir, attend d'abord de l'architecture une sorte de mode d'emploi du monde contemporain, un exemple plus "civilisateur" que le choix de sa voiture parce que moins ephémère et plus essentiel. Ce choix, ce "goût", le renvoie au jeu du passé et du futur, de son idée du temps, de l'époque où il se sent, se rêve. A travers tel usage des techniques, chacun voit une prise de position sur le futur que nous accepterions de voir apparaître et de partager. Ce mode d'emploi est à la fois pratique et esthétique. Lorsqu'on parle de l'architecture, le temps, l'évolution est en jeu. On convoque un spectacle qui parle de l'histoire et du futur, du progrès et du monde contemporain.
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L'espace cette illusion.
Dans la fragmentation, que j'ai pratiquée en volumes, dans cette attention au pluriel, il y a la conscience que la perception entière est fragmentation, l'architecture s'éprouvant dans le parcours de l'espace, en séquence.
(...)
Il ne faut pas enfermer cette notion de parcours dans le seul principe de la promenade (Le Corbusier) et de la dérive (Guy Débord) : le parcours, le déplacement, les mouvements du corps sont la pratique "utilitaire" quotidienne de tout usage de l'espace et dans notre conscience de vivre. Tout parcours peut-être fonctionnel et émotionnel à la fois, que ce soit conscient ou non.
(...)
Avec cette perception en séquence, je comprends ceux qui prétendent ne pas savoir ce qu'est l'espace. C'est une expérience concrète, jamais reproductible, tellement instable, subjective. C'est une illusion. J'aime cette faculté de l'architecture de nous faire apparaître grand un espace exigu et clos, de donner l'impression qu'il y a d'autres espaces qui se poursuivent au-delà de ses limites apparentes et pourtant ces limites nous protègent. (...) C'est un travail d'illusionniste, il transforme la vie réelle quotidienne.
(...)
Tout compte, les couleurs, les contrstes de matériaux, les entrées et réflexions de la lumière et des sons, les proportions entre les différentes parties, les ouvertures dans le parvis ou vers un lointain supposé.

C'est sans doute pour ne pas perdre de vue que chaque moment d'un parcours est différent que j'ai en général un refus de faire absolument primer la totalité.
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Stratification et désordres multiples et divers dans le temps, la rue est un ordre et une liberté. La rue ne se présente pas comme un simple dispositif technique. La rue ne sert pas seulement à circuler.
La rue relie tout bâtiment à toute la ville (...) La rue est l'interface de la société et des individus. Elle est le système de représentation d'une communauté publique qui met en relation le privé multiple et le public dans une seule forme, l'unité d'un espace public.
(...) La rue est une liste. La rue peut être infinie, petite, grande, belle ou laide.
(...) Elle est le système qui permet de pratiquer l'espace, d'y reconnaître des "adresses", des lieux de proche en proche, de se repérer, de savoir où sont les autres. Elle est comme un "moteur de recherche" : les lignes des déplacements, les trajets, les avenues sont aussi les lignes des échanges, de la diffusion des informations, du commerce. La ville des rues enseigne en silence, à chaque enfant la chose publique, le monde du dehors comme richesse accessible, appropriable. On peut dire alors de la rue qu'elle est une forme symbolique. Elle est le théâtre de la rencontre.
La rue lie notre passé et notre futur, elle nous dépasse. Elle est le calendrier qui dit le temps, elle est composée d'époques diverses.
Elle représente l'esthétique de la fragmentation et la modernité définie par Baudelaire, reprise par Nietzsche, puis Walter Benjamin et Aragon. Elle est le temps converti en lieu.
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Je voulais tordre le cou à cet axiome moderne que Georges Candilis professait et selon lequel, en concevant un ensemble de logements, il était essentiel, quel que soit le site, d'offrir à tous les mêmes conditions, les mêmes avantages, les mêmes cellules. Et, à l'époque, il fallait toujours limiter drastiquement le nombre de types d'éléments à construire pour tenir dans les prix et les délais. Mais cette recommandation de Georges Candilis ne s'appuyait pas sur la seule productivié industrielle. Cette idée de la répétition avait selon lui une autre visée : l'égalité. Ce sont pas seulement les immeubles qui devaient être les éléments standards d'une série réglée selon une logique de production, mais ce sont les habitants eux-mêmes qui devaient avoir les mêmes conditions, selon une logique de distribution démocratique.
(...)
Il y avait, dans cette passion égalitaire de l'époque, un aveuglement qui réduit l'existence de chacun. Car une condition pour que soit entretenue en moi la conscience de qui je suis, c'est que l'autre soit autre, différent. C'est à partir de là que je peux penser une liberté et que le monde de la multitude m'est acceptable. La ville doit exprimer cela, elle doit me permettre de le ressentir.
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(...) c'est l'autorité du passé, le modèle antique, qui fut toujours invoqué aux moments des tournants, des grands changement de style à la Renaissance et au Néoclassicisme. Au début du XXème siècle, les forces du futur, la technique, la machine commencèrent à menacer l'architecture. Elle allait se perdre. Le joyau avancé de la civilisation n'était plus le palais, mais l'avion, le vaccin. Le génie, la grandeur du modernisme furent de réinventer un fondement à l'architecture après la révolution industrielle. Il fallait trouver la légitimité de ses formes dans un fait de civivlisation et non dans un style subjectif. Il fallait adopter, cannibaliser le génie technique. L'utilitaire, le fonctionnement, prit la place du symbolique ancien. On parla du fonctionnalisme avec passion pour établir le style objectif qui rejetterait dans le passé toute notion de "style". L'autorité ancestrale de l'histoire fut remplacée par celle du futur. Le modernisme le plus radical contestait en fait que l'architecture demeurât une institution artistique.
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Je réalisais, en marchant dans cette cité, que cet espace entre ces immeubles-objets était celui qui fonde la perception de toute la ville (...). Ces immeubles que je regardais étaient indifférents au lieu, parce que conçus avec l'idée qu'ils étaient des objets techniques, des métaphores de machines. Et cette appartenance même à une logique générale technicienne justifiait et légitimait leur esthétique parfois très pauvre. Dans cette vision, le programme soulet les lieux à ses exigences et réduit tout espace sur la terre à un fond, une réserve de substance quantitative. Les agencements entre ces objets-bâtis des cités périphériques portent la vision d'un espace neutre, non limité. Un espace où il n'y a plus de lieux, seulement des temps de transport à travers un milieu neuf illimité. C'est la vision d'un destin humain hors-sol.
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Le langage est séquentiel, on en prend connaissance élément par élément. L'espace, le visible, au contraire, submergent notre conscience en un instant. Depuis les Grecs anciens, la tradition de l'intelligence rationnelle est née suivant l'exigence que le langage mette de l'ordre dans cette invasion des sens : il nous permet d'identifier, mémoriser, classer, organiser le monde, y compris nos sensations. Mais celles-ci nous étonnent sans cesse. Elles résistent au classement, c'est la raison d'être de la peinture et de l'architecture.
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(...) je voyais deux lignes de la modernité qui polarisaient les énergies. L'une productive, rationnelle, héritée des Lumières et de Descartes, régissait la machine du travail planétaire. Elle épanouissait l'homme en maîtrisant la nature par la technique. Elle était l'aventure prométhéenne du progrès continu que l'industrie poursuivait.
L'autre ligne de la modernité, plus magnétique, était née avec la Révolution et le romantisme en affirmant l'émancipation et l'autonomie de l'individu. C'est la voie de l'art depuis qu'il a quitté les cours royales et les églises, c'est celle de l'écriture comme "expérience des limites". Ce mouvement entre en rupture avec la production, et (avec) l'institution dès qu'elle prive l'individu de son épanouissement. La vision courante de la culture mélange ces deux lignes, mais il y a un monde entre Picasso et Le Corbusier.
Les interprétations du marxisme de cette époque se sont toutes présentées comme si elles étaient les deux lignes, à la fois voulant développer les forces productives tout en libérant l'homme total.
Pour moi, la grande distance entre ces deux lignes repoussait l'idée d'un progrès univoque, d'un sens unique de l'histoire (...). Je commençais à voir la ville comme le produit d'un perpétuel conflit entre la règle imposée par une autorité représentant la collectivité orchestrant ou non une grande ambition et le désordre, la vitalité, l'inventivité des aspirations individuelles et leurs pulsions anarchiques. La beauté des villes, quand elle existe est ce résultat.
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La fusion idéale entre le beau et l'utile est toujours un socle de jugement esthétique, socle que nous jouons souvent à subvertir. Cette idée moderne du beau tenait sa force dans son adhésion à la raison, c'était la vérité d'un combat qui connut vite les déformations et les radicalisations idéologiques. L'idée de l'unité entre le beau et l'utile conduisit bientôt à croire que la vérité de l'utile devait se substituer à toute idée du beau.
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