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Critique de Cancie


Cancie
01 décembre 2023
Après nous avoir relaté son expérience de marin-pêcheur pendant une dizaine d'années en Alaska, dans le grand marin, son premier roman, multiprimé, puis celle d'une saisonnière agricole en Provence dans le coeur blanc, Catherine Poulain, cherche à exprimer cette fois, dans L'ombre d'un grand oiseau, sa part animale, sa part de sauvagerie.
Pour raconter sa part animale intime, Catherine Poulain revient sur son enfance et même sa petite enfance dans les Alpes où elle vit dans une trinité sacrée, Dieu (son père est pasteur…), sa famille et la montagne. Elle évoque son amour pour la nature et le monde animal. Elle raconte comment elle prend conscience d'elle-même alors qu'elle a à peine cinq ans, avec la mort d'une mouche, sur une plage immense, qui s'épuise à remonter un creux de sable et qu'un gamin d'un coup de talon enfouit définitivement. Elle découvre ainsi la solitude du vivant. Elle égrène ensuite d'autres souvenirs dans lesquels elle se souvient par exemple, de ses tentatives pour sauver les mouches engluées sur le papier tue-mouches… Elle raconte aussi comment, quand elle a été malade et hospitalisée deux mois, elle a découvert à son retour sa tortue morte de faim et compris alors que posséder était tuer.
Elle nous confie aussi son amour des hauteurs, elle aime monter sur les toits, ayant alors l'impression d'être presque aussi haute que les oiseaux et avoue qu'elle aurait aimé voler, juste voler.
Elle ne rêve que de départs, de décoller, de prendre son essor et de s'arracher au monde. Finalement la route la prend bien avant l'océan.
Éprise de liberté, un besoin d'être dans le mouvement, elle est à la recherche de la frontière entre la bête et elle pour pouvoir la franchir.
La rencontre avec une fauconne blessée la fera se questionner sur notre part de sauvagerie et notre part d'assujetti. Est abordé alors le problème de l'enfermement, de la solitude.
Elle est confrontée également à cette impossibilité de pouvoir retenir le souffle de vie chez ces animaux, ces oiseaux qu'elle recueille, qu'elle réchauffe et qui pourtant meurent, tout comme elle ne peut retenir le souffle de vie de sa mère qui s'en va…
Dans un très beau passage en fin d'ouvrage, Catherine Poulain rend sa liberté aux mots, « Les mots ne sont que des mots, passagers, volatils, fluctuants, semblables aux marées, puissants comme le tonnerre parfois. Rien ne peut les retenir captifs. Seul reste leur chant, le bruit de leurs ailes lorsqu'ils rejoignent le vent, dans ce grand pays plat qui pourrait s'appeler solitudes ou silences. »
L'ombre d'un grand oiseau, référence au poème de Saint-John Perse, de Catherine Poulain, livre de toute beauté et d'une grande intensité qui décrit d'une manière unique, forte et puissante son rapport fusionnel au sauvage, m'a carrément éblouie : une plume sensible, poétique, vivante, ardente, parfois crue, un texte qui m'a happée, m'a emportée dans un tourbillon d'émotions.
Il est également une invitation à découvrir notre propre rapport à l'animalité.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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