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Critique de lebelier


Premier roman de la série qui donne des sous-titres un peu à l'ancienne, un plan qui permette au lecteur de suivre les «péripéties» qu'offre le narrateur à son lecteur.
On enchaîne donc sur la maladie et la mort de la grand-mère laissée à la fin de la première partie – on se demande pourquoi il ne la rattache pas à cette première partie justement, mais on comprend mieux à la fin lors de l'annonce de Swann -pour finir jusqu'à l'acceptation du narrateur dans les dîners des Guermantes.
Sur les deux parties, il aura donc rêvé de la duchesse puis l'aura épiée, approchée par amis interposés et enfin aura été totalement accepté au sein de cette famille de la duchesse Oriane jusqu'à la princesse Marie.

Que se passe-t-il donc de si important dans cette deuxième partie? La grand-mère meurt, le narrateur fait des papouilles à Albertine, donne des rendez-vous excitants dans l'île du Bois aux femmes mariées pour retrouver son ami Saint-Loup et enfin, soirées après soirées, étudie à fond la généalogie des Guermantes en rencontrant des altesses et autres princesses. Au passage, nous aurons droit à quelques réflexions bien senties sur l'art en général et les diverses façons qu'ont «les gens du monde» de l'apprécier.

"Mais les gens du monde n'ajoutaient pas par la pensée à l'oeuvre d'Elstir cette perspective du temps qui leur permettait d'aimer ou tout au moins de regarder sans gêne la peinture de Chardin."

On analyse aussi finement que possible, les comportements de l'aristocratie où une réflexion, un geste provoquent chez la narrateur un développement, un «courant de la conscience» joycien.
le personnage de Charlus prend de plus en plus d'importance dans ses excès, son orgueil démesuré et dans sa colère qui éclate dans ce chapitre, pour, semble-t-il un mot offensant qu'aurait pu dire le narrateur à une tierce personne mais qui exprime surtout sa déception qu'on ne s'intéresse pas davantage à lui, ce qui le rend somme toute assez comique. Il tiendrait presque le rôle d'un bouffon un peu tragique:

"Pensez-vous qu'il soit à votre portée de m'offenser? Vous ne savez donc pas à qui vous parlez. Croyez-vous que la salive envenimée de cinq cents petits bonshommes de vos amis, juchés les uns sur les autres, arriveraient à baver seulement jusqu'à mes augustes orteils?"

Pour le narrateur, seuls les Guermantes possèdent cette liberté d'esprit et de mouvement, un peu grâce à Oriane et ses saillies verbales, sa culture sûre qui renvoie aux antipodes, ce pendant grotesque et «bling-bling» des Guermantes que sont les Courvoisier. D'autre part, des altesses se succèdent et le narrateur maintient son regard aiguisé sur leur façon d'être charitable ou leur soi-disant culture. On sait qu'au début de sa fréquentation du salon Guermantes, le narrateur n'étant pas connu des «gens du monde», était pris pour un de ces ingrédients nécessaires à toute soirée mondaine, le génie littéraire, artistique ou scientifique, ce qui donne quelques scènes assez amusantes, notamment avec le comte de Bréauté. La princesse de Parme quant à elle, assure son statut d'aristocrate:

"Ainsi même dans les moments où elle ne pouvait pas faire de bien, la princesse cherchait à montrer, ou plutôt à faire croire par tous les signes extérieurs du langage muet, qu'elle ne se croyait supérieure au milieu de qui elle se trouvait. Elle avait avec chacun cette charmante politesse qu'ont avec les inférieurs les gens bien élevés et à tout moment, pour se rendre utile, poussait sa chaise dans le but de laisser plus de place, tenait mes gants, m'offrait tous ses services, indignes des fières bourgeoises, et que rendent bien volontiers les souveraines ou, instinctivement et par pli, les anciens domestiques."

Mais toutes ces mondanités sont parfois un peu tuantes pour le lecteur, si tous ses liens de parenté passionnent le narrateur, cette mécanique des Guermantes aux rouages si complexes finit par faire un peu bâiller à certains moments. On m'avait prévenu, ce n'est pas le meilleur passage de la "Recherche" que ce "côté de Guermantes". Et c'est surtout vrai pour cette deuxième partie. Mais comme dirait notre narrateur favori, ce qui explique en grande partie cette dissection des apparences:

"Un artiste n'a pas besoin d'exprimer directement sa pensée dans son ouvrage pour que celui-ci en reflète la qualité; on a même pu dire que la louange la plus haute de Dieu est dans la négation de l'Athée qui trouve la Création assez parfaite pour se passer d'un Créateur."
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