Citations sur Le piège (54)
Mon monde est réduit en poussière. Je suis assise sur mon lit au milieu des décombres et fixe le téléviseur des yeux. Je suis une plaie ouverte. Je suis l'odeur de la chair crue. Je suis béante. Un éclair me traverse le crâne, douloureux et d'une clarté éblouissante. Mon champ de vision se teinte de rouge, je m'aggrippe le coeur, j'ai le vertige, ma conscience vacille, je sais ce que c'est cette sensation crue, rouge, j'ai une crise d'angoisse, je fais de l'hyperventilation, je ne vais pas tarder à m'évanouir, j'espère que je vais m'évanouir. p.13
Mon monde tressaille. Je ne comprends pas ce qui se passe autour de moi mais mon lit tremble, les étagères de livres se mettent à chancelier et finissent par s'effondrer. Des cadres tombent des murs, du verre se brise, des fissures se forment au plafond, d'abord très fines, puis larges comme le doigt. Les murs s'écroulent, le bruit est indescriptible et pourtant tout est silencieux, complètement silencieux. p.12
Le tueur a laissé des fleurs chez Britta ! Quel tueur normal, qui agirait sous le coup de l’émotion ou pour un motif crapuleux, dépose-t-il des fleurs près de sa victime ?
Je me dis que certaines personnes me prendraient pour une folle furieuse s’ils savaient ce que je compte faire demain. Je suis consciente de l’aspect contradictoire de mon comportement. Je suis terrifiée, et pourtant j’invite un meurtrier chez moi. Je me sens très fragile, et pourtant je pense pouvoir en sortir gagnante. Ma vie ne peut pas devenir pire, et pourtant j’ai peur de la perdre.
Il arrive relativement souvent que d’anciennes affaires, ce qu’on appelle des cold cases, soient résolues à l’aide de données ADN, qui sont en quelque sorte une empreinte digitale génétique, dit-elle. Ces données restent parfaitement fiables même des décennies après les faits.
J’ai vu Victor Lenzen lors de cette nuit abominable, caniculaire, rouge foncé. J’en suis certaine.
Linda et ses histoires.
Je l’ai vu.
Tout comme tu as vu le faon dans la clairière quand tu étais petite ?
Justement, j’étais encore un enfant. Tous les enfants racontent des histoires, inventent des choses.
Et toi, tu continues à le faire aujourd’hui.
Je sais ce que j’ai vu. Je ne suis pas folle.
Ah non ?
On se demande tout le long si l’auteur nous a également piégé. Rien de tout cela.
Beaucoup de longueurs cependant.
Je pense à Anna. Pas l’Anna angélique que j’ai inventée ces dernières années dans ma tête et dans mon livre, mais la véritable Anna, celle avec qui je me disputais et me réconciliais, celle que j’aimais.
Je pense à Lenzen, qui est mort et à qui je ne pourrai plus demander pourquoi il y avait des fleurs dans l’appartement d’Anna. S’il les lui avait offertes. Si elle aimait ses fleurs coupées à lui.
Je me dis que l’ancienne Linda, la Linda impulsive, le regarderait maintenant dans les yeux et poserait la main sur son bureau, la paume vers le haut, pour voir s’il la prend dans la sienne. Mais je ne suis plus cette Linda-là. Je suis une femme qui s’est tellement laissé intimider par la vie qu’elle n’est pas sortie de chez elle pendant onze ans. J’ai traversé bien des épreuves. J’ai vieilli et suis peut-être même devenue plus raisonnable. Je suis consciente que Julian a une vie dans laquelle je n’ai pas ma place. Je réalise qu’il serait égoïste d’essayer de m’y introduire.
Un piège est un dispositif servant à attraper ou à tuer.