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Critique de ssstella


Finis l'abus patronal, l'exploitation ouvrière, le paternalisme pépère.. les temps changent... aller au boulot avec le même enthousiasme que si on allait au Luna Park... voilà un peu la façon dont on nous présente régulièrement les startups.
Des lieux idylliques, ultra-contemporains et colorés, où l'on peut faire des pauses ping-pong ou PlayStation, se déplacer d'un point à un autre en skate ou en trottinette, au passage plonger à volonté sa main dans des aquariums remplis de bonbons multicolores.
Oui, les temps changent... mais finalement rien ne change, et c'est même peut-être pire dans l'open space design des jeunes pousses de l'internet. Ce petit livre, nous engage à regarder de plus près les conditions de travail dans ces startups.

"On invente pour cela de nouveaux décors qui, surtout, ne doivent ressembler à rien qui ait déjà existé. Dans ce jardin d'Eden modèle qu'est devenu l'open space des années 2010, on plante des robots d'un genre nouveau : des jeunes motivés qui se sentent l'âme de conquistadors et occupent des postes dont le titre reste énigmatique au commun des mortels, mais qui garde un suffixe que beaucoup admirent : manager. Super rapides, flexibles, increvables, perfectionnistes, ces nouveaux aventuriers de l'ère de la data n'ont plus ni dieu ni maître, mais une nouvelle langue commune et, en l'occurence, un seul mot à la bouche : l'innovation. La présence, même symbolique, de leur Mecque lointaine, la Silicon Valley, finit d'ancrer le sentiment d'appartenance à l'entreprise, qu'on appelle désormais "famille"." P. 18 et 19

Bon, le décor est planté... ensuite vous faites connaissance avec les employés... dès l'accueil vous n'avez pas affaire à une secrétaire mais à une "office manager"... oui, parce qu' ils sont tous managers ! Un titre ! Première friandise offerte... ça impressionne, ça flatte et... ça ne coûte rien.

"Avec la révolution digitale, de nouveaux métiers ont éclos de toutes parts : community manager, content manager, quality manager, SEO manager... Même s'ils jouissent du grade de manager sur le papier, ils sont rarement le fruit de longues années d'études ou d'expérience, et la réalité de leur quotidien ne fait pas toujours pâlir d'envie. À vrai dire, tout le monde est manager." P.44

Le manager est sous payé, parce que la start-up démarre (comme son nom l'indique) et elle ne peut pas faire mieux, mais elle propose des "perspectives d'évolutions" (qui seront comme les augmentations, très improbables). Mieux encore, souvent on vient avec son ordinateur portable et on ne compte pas les heures supplémentaires non-payées.

"L'une des définitions de la startup pourrait être la suivante : il s'agit d'une jeune entreprise dotée d'un fort potentiel, mais qui n'exerce pas encore d'activité rentable." P. 94

Ne garder qu'une chose en tête : le succès de la startup. Alimenter les réseaux sociaux pour faire vivre l'identité de l'entreprise.

"Passer du temps avec sa famille ? D'accord, mais pas trop quand même... Sauf si on arrive à garder un oeil sur les réseaux sociaux et à penser à la boîte en même temps, comme on parle d'une tâche de fond en informatique." P. 75

Je ne vais pas vous dire tous les stratagèmes mis en place pour optimiser le travail des managers d'une startup parce que j'aurais envie de vous mettre tout le livre en exemple. Mathilde Ramadier en a fait le tour, elle éclaire violemment tous ces avantages régressifs et autres trucs "sympa" offerts joyeusement (hypocritement ?) par ces boites trop cool.
À découvrir pour ouvrir les yeux sur l'envers du décor de ces startups luna park pas si rigolotes que ça.

Merci à Masse critique, à Babelio, aux éditions Premier Parallèle et un grand merci tout particulier à Marie-Delphine.
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