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Critique de Cancie


Violoniste virtuose et écrivaine reconnue, Léonor de Récondo signe avec son neuvième roman, le grand feu, le premier où musique et écriture sont réunies.
Le 31 mai 1699, à Venise, Francesca Tagianotte met au monde une fille, Ilaria, son sixième enfant.
Quelques mois avant, avec son époux Giacomo, ils s'étaient rendus à la Pietà et lorsqu'elle avait entendu chanter le choeur des jeunes filles cachées derrière les grilles, Francesca avait dit « si tu es une fille, tu chanteras avec elles. »
Ayant insisté pour obtenir une place à la Pietà, grâce à sa cousine Bianca qui en est la gardienne, la petite Ilaria, bien qu'issue de classe moyenne, dès ses trois mois, est acceptée par la Prieure et donc confiée à cet établissement de charité qui accueillait seulement les orphelines ou des filles de parents assez riches pour payer les cours de musique.
Voyant très rarement ses parents, Ilaria va grandir au sein de cette communauté féminine qui comprenait pas moins de neuf cents filles et dont les règles étaient calquées sur celles d'un couvent . Trop jeune à six ans pour commencer de travailler sa voix, Ilaria, sous l'impulsion du nouveau maestro di violino, Antonio Vivaldi, va alors apprendre le violon, ce violon qui va devenir sa voix. Au même printemps, entre, à la Pietà, Prudenza Leoni, une enfant de huit ans, issue d'une famille patricienne, qui, elle, ne vient que quatre fois par semaine prendre des cours, mais qui deviendra bien vite l'amie d'Ilaria et l'ouvrira au monde.
Léonor de Récondo nous fait suivre le destin de cette jeune musicienne Ilaria, nous fait vivre avec incandescence le feu qui va la consumer tout en nous plongeant dans cette Venise baroque du XVIIIe siècle où la Sérénissime brille de tous ses feux sur le plan artistique, où la musique est omniprésente et est l'art de toutes les fêtes.
Le cadre du récit est donc cette sublime capitale de tous les arts qu'était Venise au XVIIIe siècle avec pour la musique, Antonio Vivaldi, ce musicien virtuose, maître de chapelle, violoniste au séminaire musical de l'Ospedale della Pietà où sont élevées de jeunes orphelines à qui il enseigne le chant et le violon.
C'est un fabuleux tableau que nous donne à voir, entendre et ressentir Léonor de Récondo en nous dépeignant cette lagune où glissent les gondoles de palais en palais, de véritables instants suspendus tout en ombres et lumières.
Elle brosse également avec talent le portrait du Maestro qui apprécie particulièrement la qualité du silence lors des concerts dominicaux, ces concerts où les jeunes filles chantent et jouent leur partition derrière les grilles, ces concerts qui représentent une attraction pour les mélomanes tout à la fois enthousiastes et intrigués, ces concerts connus de l'Europe entière comme étant d'une exceptionnelle virtuosité.
Sont aussi partie prenante de l'histoire, les derniers bastions vénitiens en mer Égée avec l'île de Tinos sur lesquels pèse la menace ottomane.
J'ai suivi avec passion cet apprentissage du violon pour Ilaria, cet instrument qui devient peu à peu un prolongement de son corps, une partie intégrante d'elle-même et « une voix d'or dans les bras d'une enfant ».
Emportée par son ardeur musicale, Ilaria va brûler du feu de la musique, « Ces faisceaux de musique qui se rassemblent et s'embrasent », la contraignant, dans une scène sublime, à s'immerger dans la lagune.
Ce feu induit par sa communion avec la musique se doublera bientôt du feu de l'amour, deux passions qui vont se confondre pour produire cette explosion finale, ce grand feu.
Le grand feu est un récit initiatique féministe flamboyant et pourtant très intimiste.
Musique et écriture y fusionnent de façon magistrale.

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