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Critique de Eve-Yeshe


Nous sommes au milieu des années 80 aux USA. June, une jeune adolescente de 14 ans, solitaire, réservée pose avec sa soeur Greta, 15 ans pour son oncle Finn, artiste peintre reconnu, le frère de sa mère, à New-York.

Finn est homosexuel atteint pas le SIDA dont on ignore tout alors, du virus, son mode de contamination et pour lequel il n'y a pas de traitement.

Elles viennent toutes les semaines à New-York mais autant June apprécie chaque instant en compagnie de cet oncle qu'elle vénère autant Greta essaie de fuir, lançant au passage des réflexions plutôt acerbes.

le jour de l'enterrement, elle aperçoit un homme rongé par le chagrin que sa mère refuse de voir assister à la cérémonie. Qui est cet homme ? Que lui cache-t-on ?

Ce que j'en pense :


Au travers de ce livre, on retrouve l'impact du SIDA sur ces années 80 et au-delà, l'étendue de l'ignorance à l'époque, concernant cette maladie qui frappait les homosexuels et que l'on considérait comme la punition d'une sexualité dévoyée.

Plus généralement, l'auteure nous parle aussi de la façon dont on considérait l'homosexualité à cette époque, avec le refus de la mère de June de connaître Toby, le compagnon de Finn, allant jusqu'à le traiter d'assassin, de meurtrier, c'est tellement plus facile de rejeter la faute sur lui quand on se dit « bien pensant », détenteur de la vérité absolue au nom de laquelle elle se donne le droit de juger la vie des autres.

June que Finn a surnommée Crocodile, est touchante par sa réserve, sa solitude, sa différence par rapport aux autres ados de son âge. Elle est passionnée de Moyen-âge, elle porte des jupes longues, des pulls immenses rejetant les jeans des copains et bien sûr ses bottes médiévales. Elle marche des heures dans les collines qui surplombent l'école, seule.

Elle marche pour se transporter hors du présent, dans une autre époque, où elle peut se souvenir de Finn, leurs discussions, leurs restaurants préférés…

A l'heure actuelle, on ne l'envisagerait même pas, étant donnée le risque de se faire agresser. Elle est moins brillante que sa soeur Greta, artiste en herbe qui prépare une comédie musicale pour l'école, où elle tient le rôle vedette. Mais cette soeur ainée histrionique, surdouée, brillante à l'école comme au théâtre, est mal dans sa peau, elle a des avis sur tout, domine sa soeur, ne manquant pas une occasion de la blesser par ses remarques. Elle flirte avec la vodka car ne sait pas exprimer ses tourments d'adolescente.

Les deux soeurs ont été proches autrefois, inséparables, l'aînée veillant sur la plus jeune, mais un jour tout a changé.

Bien sûr, « cet amour » pourrait choquer mais on n'est pas dans le domaine de la sexualité, on est dans l'amour pur, d'une ado qui ne voit jamais ses parents qui travaillent tout le temps et laissent leurs filles se débrouiller seules (c'est cela qui me choque en fait…), comment se construire sans une image paternelle forte ? On voit évoluer June en très peu de temps elle va être précipitée dans l'univers des adultes.

Sa relation avec Toby est très intéressante aussi ; ils sont « amoureux » de Finn tous les deux, ils essaient de le faire revivre pour moins souffrir et des émotions contradictoires se surajoutent.

le tableau qui donne son titre au livre, est un des personnages principaux, en fait car il tient toute le place, dans la tête des deux filles, dans celle des parents quand il prend une valeur marchande. Chacun essaie d'y apporter une touche, quitte à le modifier pour se l'approprier un peu, et voir au-delà dans ce que Finn appelle les espaces négatifs. Il est avec le requiem de Mozart, le symbole des liens et des choses que June et Finn partagent.

La palette des couleurs est toujours là, dans le réel, dans l'imaginaire, dans les émotions…

Qui sont ces loups ? Ceux qui hurlent dans les bois, ceux qui se cachent derrière les émotions ?

C'est difficile de parler de ce livre sans dévoiler l'intrigue pour intéresser suffisamment les lecteurs pour qu'ils aient envie de l'ouvrir et faire ce voyage.

L'histoire est écrite à la première personne, par June (Carol ?) elle-même du haut de ses quatorze ans.

C'est le premier roman de Carol Rifka Brunt et c'est un coup de maître. Tout est très bien étudié, les personnages sont bien travaillés, l'intrigue est passionnante jusqu'à la dernière page. J'ai dévoré ce livre, tout en essayant de freiner la lecture pour que le plaisir dure plus longtemps. Et, encore une fois, merci à Babelio et aux éditions Buchet Chastel pour m'avoir fait découvrir ce bon livre. j'attends le deuxième roman de Carol Rifka Brunt car elle fait des débuts prometteurs.

Note : 9/10
Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
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