Les héritiers d'Enkidiev, tome 8 : An Anshar

Battant faiblement des paupières, Hadrian ne reconnut pas les objets qui l'entouraient. Refusant de céder à la panique, il commença par scruter son propre corps pour s'assurer qu'il n'était pas blessé, ou pire encore, paralysé. Soulagé de rein trouver de tel, il tenta de se redresser sur ses coudes.«Aucun geste brusque», songea-t-il. Il constata qu'il portait ses vêtements habituels. C'était tout le reste qui ne lui était pas familier.


Une fois qu'il eu reprit ses sens, il parvint à s'asseoir. L'abri dans lequel il reposait était fait de toile épaisse qui laissa filtrer une apaisante lumière dorée. Il respira l'air chaud. Sa mémoire le ramena immédiatement à ce qu'il avait fait avant de perdre connaissance. «Je suis dans le Désert», conclut-il. L'énergie qu'il avait déployée pour diriger le fleuve vers l'océan l'avait vidé de ses forces. Sa présence dans une tente de nomades indiquait donc que ceux-ci l'avaient secouru.

Hadrian regarda autour de lui et aperçut la cruche laissée à la portée de sa main. Il goûta l'eau: elle était fraîche. Il se désaltéra, puis sortit du pavillon. À ce moment de la journée, le peuple des egrs réduisait ses activités au minimum. On conduisait les animaux à l'ombre des oasis, puis chacun filait dans sa demeure. Certains en profitaient pour dormir, d'autres bavardaient en buvant le thé chaud délicieux infusé avec des fruits. Ils ne quittaient leur refuge qu'au coucher de soleil et vaquaient alors à leurs dernières activités.

L'ancien Roi d'Argent demeura immobile à un pas de sa tente, aveuglé par les rayons de l'astre du jour. IL leva la main pour protéger ses yeux et distingua la silhouette d'un homme enturbanné qui venait à sa rencontre.

- Les dieux te protègent, Hadrian

Le nouveaux chef de cette importante tribu de Danakis lui tendis les bras. Son invité les serra avec amitié.

- Qu'ils en fassent autant avec toi, Chokri

Le successeur de Zharan était jeune et robuste. Ses yeux bleu clair offraient un contraste frappant dans son visage tanné par le soleil.

- Maintenant que tu est revenu à toi, sans doute pourras-tu m'expliquer pourquoi nous t'avons trouvé non loin du campement.

Ils marchèrent jusqu'à la tente du dirigeant et s'installèrent sur des coussins. Hadrian accepta un petit verre de thé avec plaisir

-Je ne pourrai donc jamais empêcher le mauvais sort de s'abattre sur moi ?
-Probablement pas, mais tu pourrais sans doute apprendre à le déjouer. Un homme vigilant est difficile à piéger.

– Quelqu'un doit dicter les règles qui instaureront une harmonie durable et les faire ensuite respecter.
– Il n'y en a pourtant que deux qui devraient déjà être gravées au cœur de tous les êtres vivants : traiter les autres comme nous voulons être traités et faire preuve de gratitude envers ceux qui nous inondent de bienfaits.
– Nous les enseignerons à nos sujets.
– Commencez d'abord par les appliquer dans votre propre vie, Nashoba et toi.