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Critique de Bernardbre


Il y a du Borges chez Paul Louis Rossi – qui, ailleurs, racontait avoir observé l'écrivain argentin attablé à quelque terrasse de la cité des Doges –, dans une gourmandise de connaissance échappant à tout didactisme, à toute prétention de supériorité savante. Ici se succèdent plutôt, simples jusqu'à l'humilité, des souvenirs intimes, ténus, mais ouvrant toujours sur un universel qui, partant, y convoque généreusement chaque lecteur.
La nécessité de l'auteur est ici flagrante, comme compulsive, de retenir, fixer ou préciser, se livrant à l'exercice d'anamnèse qu'exige toute écriture réfléchie. Et l'on pourra s'étonner que les évocations de Paul Louis Rossi se teintent souvent de ce à quoi nous avaient guère habitués ses précédents ouvrages, à savoir une mélancolie récurrente ; l'écriture semble devenir ici analgésique, sinon remède. Quoi qu'il en soit, le miracle des livres de ce natif de Nantes – cf. "La Voyageuse immortelle" – tient en ce que la finesse de son expression, insatiablement érudite mais jamais pesante, rend intelligibles à tout lecteur doué de curiosité les découvertes et les rencontres d'un auteur mû par une aussi réjouissante boulimie: tout lieu du temps ou de l'espace l'intéresse. Paul Louis Rossi se révèle ainsi capable de nous transporter en un trait de plume de la Rochelle au Mississipi ou de Rosario au Nouveau-Mexique, s'appliquant à des descriptions d'objets, de figures ou de paysages aussi minutieuses que méfiantes des effets littéraires.
Mais venons-y; le fil de ces fragments de mémoire part d'un objet katchina aperçu dans une vitrine de la rue Bonaparte, à Paris, et nous voilà d'un coup embarqués chez les Pueblos, Apaches, Navajos, Iroquois, Hopis, Zuñis et autres Anazanis – si souvent ignorés des meilleurs dictionnaires. Comme un enfant s'émerveillant du détail le plus insignifiant, tout passionne et interroge Paul Louis Rossi, des hommes, de leur histoire et de leurs oeuvres. «J'ai le fantasme de posséder la mémoire absolue» confie-t-il ; on ne saurait mieux le prouver.

Chronique parue dans "Encres de Loire" n° 57 page 35, automne 2011
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