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Critique de hannah851


Satire piquante et sucrée de la haute société londonienne et du monde de l'art, ce premier roman d'Hannah Rothschild est aussi une enquête sur l'histoire d'un tableau tombé dans l'oubli jusqu'à son acquisition par Annie McDee chez un antiquaire brocanteur londonien. Jeune chef cuisinière se remettant difficilement d'une séparation amoureuse, elle est loin de se douter qu'elle vient d'entrer en possession d'une oeuvre originale du XVIIIème siècle peinte par Antoine Watteau.

Intriguée et curieuse, Annie va chercher à découvrir l'histoire de ce tableau dont plusieurs couches de vernis cachent la composition. Avec une certaine érudition et une connaissance profonde du milieu du monde de l'art, l'auteur vulgarise les questions de restauration des oeuvres et de leur authenticité. Elle va même plus loin en présentant un panorama des politiques et des difficultés financières actuelles que rencontrent les collections privées et publiques britanniques et étrangères. En immergeant peu à peu le lecteur dans le marché de l'art, l'auteur rend compte des activités plus ou moins légales des maisons de vente qui cherchent à tirer profit de l'engouement parfois incompréhensible des collectionneurs pour l'art. En donnant la parole à plusieurs personnages, l'auteur évoque le débat actuel sur la valeur commerciale qu'on accorde aux oeuvres d'art et du prix que chaque collectionneur est près à payer. de l'oligarque russe exilé à l'expert de Watteau en passant par le conservateur de musée, le président de la République française, le dandy Barty ou le commissaire priseur dealer, chacun développe une relation spécifique avec le tableau. L'auteur réussit ainsi à faire habilement cohabiter deux notions de l'art contradictoires : l'art comme simple valeur monétaire et l'art comme reflet de l'âme humaine.

L'auteur à l'idée originale et surprenante au milieu du roman de faire parler le tableau pour dévoiler aux lecteurs ses sentiments, son ressenti et son histoire de sa création à sa fin. Cette interpénétration de plusieurs voix permet de donner aux chapitres une dynamique et d'entretenir le rythme frénétique du roman qui ressemble par plusieurs aspects à une peinture rococo par son atmosphère mais aussi par le style fluide et descriptif de l'auteur qui s'arrête aussi bien sur les oeuvres d'art que sur les banquets et les succès culinaires d'Annie McDee ou les tenues originales du dandy Barty.

Combinant le genre policier et la romance, l'histoire aborde aussi la question de l'amour, de la perte mais aussi de la moralité et de l'avarice du genre humain. Si la romance fait partie de l'histoire, elle n'en occupe cependant pas une place aussi prépondérante que l'enquête sur l'histoire de l'oeuvre et de ses différents propriétaires. Son identité se cache en effet dans la période la plus noire pour l'histoire de l'art et les grandes collections modernes avec les spoliations juives et les pillages artistiques de l'Europe par et pour le régime nazi.

Avec ce roman à la fois triste, profond et drôle, l'auteur arrive à évoquer dans les grandes lignes le monde de l'art et ses enjeux actuels. C'est ce qui fait tout son intérêt et sa force avec une toile de fond actuelle et réelle sur laquelle l'auteur tisse une histoire imaginaire. Je remercie Babelio et les éditions Belfond pour cette lecture agréable et plaisante dans les méandres du marché de l'art.
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