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Critique de CDemassieux


Avant de nourrir notre imaginaire à présent libre – relativement – des contraintes religieuses et politiques, les sorcières, et dans une moindre mesure les sorciers, ont été l'objet de détestation et de fantasmes ayant coûté à nombre d'entre elles tortures et bûcher.
Toutefois, Jean-Michel Sallmann, dans ce dense et court essai, accompagné de nombreuses et édifiantes illustrations (la marque de fabrique de la collection Découvertes Gallimard), remet quelques pendules à l'heure. La première étant que la fameuse chasse aux sorcières n'est pas l'apanage du Moyen Âge, époque que certains pseudo historiens habillent de toutes les tares : « Les deux périodes critiques se situent respectivement entre 1480 et 1520 et de 1580 à 1670. » Seule la Pologne « entreprendra sa chasse au début du XVIIIe siècle ». On parle bien entendu de l'Europe.
Second écueil, l'Inquisition (romaine ou espagnole, cette dernière souvent confondue avec l'Inquisition en général) n'eut qu'une faible part dans cette chasse : « Quand l'Inquisition intervenait dans les cas de sorcellerie, elle le faisait généralement pour calmer les ardeurs des juridictions séculières [laïques]. »
Certes, comme le souligne l'auteur, l'Église prenait ses distances avec des excès qu'elle avait elle-même provoqués. Voir la bulle pontificale « Summis desiderantes affectibus » du pape Innocent VIII, restituée en fin de volume dans la partie « Témoignages et documents », où l'on peut lire par ailleurs quelques extraits du Discours exécrable des sorciers, du démonologue Henry Boguet, « douze fois réédité en vingt ans », précise Wikipédia ! C'est dire la perméabilité des esprits d'alors à ce que l'on considérera plus tard comme des superstitions ou une source d'inspiration, notamment chez les Romantiques, qui réhabiliteront la figure de la sorcière, à travers, entre autres, la vision anachronique de Michelet voyant dans la sorcière une femme révoltée.
A savoir que les sorcières étaient souvent désignées par la rumeur. C'était une époque où les croyances populaires étaient tenaces, entretenues par un climat de terreur mystique, bien loin de la vraie foi, selon moi. Ces dénonciations entraînaient parfois des épidémies de sorcières provoquant des accusations en cascade, toutefois loin des hécatombes avancées par certains, selon les historiens.
Toutes ces désagréables choses énoncées, il est évident que ces pauvres femmes étaient accusées de maux imaginaires, et comme tout ce qui était étrange relevait souvent du Diable à l'époque, il n'en fallait pas plus pour les envoyer se faire griller en enfer. Nous parlons d'un temps où les comportements psychiques déviants et les connaissances liées aux sciences étaient suspectes. Tout ceci donna lieu à une abondante littérature sur la démonologie (étude des démons), dont le fameux Marteau des sorcières, rédigé par les dominicains allemands Henri Institoris et Jacques Sprenger.
Et alors que Descartes – qui doutait plus que les démonologues, tout le monde sait ça ! – vivait ou avait vécu, en France, des affaires retentissantes se produisirent, dont celle des diables de Loudun n'est pas la moindre, même s'il faut y voir aussi la main du politique, ladite affaire impliquant des religieuses de la noblesse.
Quoi qu'il en soit, mesdames et messieurs, et même si ça vous chatouille, gardez-vous de voir forcément en votre belle-mère une sorcière : c'est peut-être juste une emmerdeuse !
(Petite remarque toute personnelle : j'ai acheté le présent volume dans une brocante et c'est une réédition de juillet 2000. Page 25, il y est question de Philippe le Bel et de ses accusations de sorcellerie à l'encontre des Templiers. Jusqu'ici tout va bien, mais ceci s'est déroulé au XIVe et non au XVe siècle. L'erreur a peut-être été corrigée depuis… ?
Ajout de dernière minute : dans ma précipitation, j'ai omis de signaler une autre erreur de date : page 156, l'affaire de Loudin s'est produite au XVIIe siècle, pas au XVIIIe !
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