Elle connaissait la méchanceté des filles à l'école, insidieuse, faite de mensonges chuchotés dans le dos, mais qui tôt ou tard s'épuisait comme un feu d'herbes sèches.
Donc Maddalena supportait tout.
Les cris, les chants et les vivats explosèrent, hurlés par l'être unique et monstrueux, sans forme ni corps, qui nous entourait.
Toute la soirée, on diffusa des discours et des chansons. Partout dans la ville les gens étaient en proie à une agitation insolite, comme s'ils avaient enfin trouvé dans ce cri de guerre une véritable raison de vivre;
Aucune toile n'était tombée du toit pour me fendre le crâne, aucune constriction des poumons ne m'avait suffoquée, aucun arrêt intempestif du cœur. J'avais parlé avec la Malnata, je l'avais fixée dans les yeux et le démon ne m'avait pas extirpé l'âme par les oreilles.
Le monde était régi par des règles qui ne devaient pas être violées. Il était rempli d'affaires de grands, énormes et dangereuses, et de fautes sans rémission qui pouvaient vous tuer ou vous envoyer en prison. C'était un endroit terrifiant, plein de choses interdites, où il fallait marcher sur la pointe des pieds en faisant bien attention à ne rien toucher. Surtout quand on était une fille.
Si tu veux pouvoir te dire un homme, tu dois être capable de tuer. Guerre ou pas guerre.
L'honneur, on peut en avoir sans la guerre. Et sans le Duce.
C'est la guerre qui fait de toi un homme, parce que c'est seulement le jour où tu connais le sang que tu peux dire que tu es un grand.
Les mots sont dangereux si tu les dis sans penser.
J'avais l'impression que nous venions de plonger dans un secret, quelque chose de sale et de mystérieux et de trop grand pour nous. Quelque chose qui ne pouvait amener que des malheurs.