- C'est fou qu'une meuf comme toi soit encore célibataire à ton âge. Si tu veux des descendants, il va falloir te trouver un mec, et vite !
Il ponctua son offre d'un clin d'œil suggestif.
Les deux compères étaient au bord des larmes depuis qu'il avait mentionné l'appel à leur parents. Des rebelles à la mie de pain, se dit-il, réprimant son envie de rire.
Il balaya l'assemblée du regard, histoire de se donner une contenance, et passa une main nerveuse dans ses cheveux poivre et sel. Des profs. Un véritable cauchemar.
Elles étaient encore après le derrière de Virginie quand une voix tonitruante leur ordonna de s'asseoir. Elles échangèrent un regard interloqué et obtempérèrent, s'asseyant au milieu de l'assemblée. De leur place, elles avaient une vue imprenable sur leur nouveau principal-adjoint, une homme d'une quarantaine d'années à l'allure athlétique, au visage sévère, mais aux traits agréables. Son costume à la coupe stricte lui conférait une autorité qui ne se démentit pas lorsqu'il prit la parole. Pas mal, pensa Emilie.
- J'adore les mecs avec de la poigne, leur murmura leur collègue d'Anglais, une femme élégante d'une cinquantaine d'années.
Elle assortit sa déclaration d'un miaulement retentissant qui fit se retourner les premiers rangs et ne manqua pas d'attirer l'attention des chefs. Emilie pouffa, tentant de dissimuler son hilarité derrière le cahier qu'elle promenait partout, en bonne élève qu'elle était. Un regard aux visages agacés de la principale et de son acolyte suffit à la calmer.
- J'ai l'impression qu'on va rigoler cette année, souffla t-elle à Steph qui acquiesça, la mine déconfite.
Il était même descendu lui ouvrir la portière de la voiture et elle avait trouvé cela désuet, mais mignon. Tellement mignon qu’elle lui avait sauté au cou pour le remercier de sa gentillesse. C’était alors qu’elle avait remarqué ces adorables taches de rousseur qui couraient sur son nez et ses pommettes. Elle avait trouvé cela diablement sexy. Une chose en avait entraîné une autre…
Elle prit une une décision radicale ce jour-là : elle éviterait autant que possible son chef aussi bien que Guillaume, l'un parce qu'elle le trouvait bizarre, l'autre parce qu'il lui compliquait la vie.
A l'abri des regards, elle pouvait bien se l'avouer. Il allait énormément lui manquer, elle ne parvenait même pas à imaginer le collège sans lui.
Il n'y a pas grand-chose à dire Em! Ca fait trois ans que ça dure! Je suis fou de toi, tu en es pleinement consciente et tu joues avec moi! (...)
Et tu sais ce que je crois Em? C'est que toi aussi tu ressens un truc pour moi, mais tu es trop lâche pour te l' avouer. Ca t'arrange bien de te dire qu'on est juste des amis, que je ne suis qu'un gamin et qu'on n'a pas d'avenir ensemble. En fait, ça n'a rien à voir avec l'âge, tu as la trouille, c'est tout!