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Critique de 5Arabella


Il s'agit de la vie d'une femme noire de Guadeloupe , contée par elle-même. Et d'abord elle nous raconte la vie de celles qui l'ont précédées, sa mère et surtout sa grand-mère Toussine, dite la Reine Sans Nom. La mère de Toussine a encore connu l'esclavage ; Toussine a eu ses moments de bonheur et de douleur, mais elle est très heureuse de prendre chez elle Télumée, notre héroïne lorsque Victoire, sa mère, se met en ménage avec Haut-Colbi, un nègre caraïbe. La petite fille va aimer et aider sa grand-mère au quotidien. Elle doit travailler, et comme sa grand-mère ne veut pour rien au monde qu'elle aille le faire dans une plantation, elle la place comme domestique dans une famille blanche. Télumée va compter les jours, mais elle supporte cette difficile expérience grâce à son amour pour Eli, son camarade d'enfance, qui lui a promis de venir la chercher lorsqu'il aura fini de construire leur case. Et il tiendra parole. Nous suivons ainsi la vie de Télumée jusqu'à sa vieillesse, dans ses moments heureux comme malheureux, et ces derniers sont de lui les plus nombreux, peu de possibilités de vivre correctement étant offerts aux noirs dans le monde de Télumée. Entre les désordres climatiques, la pauvreté, le manque et la dureté du travail, l'alcoolisme, surtout des hommes, et leur violence, la jalousie et les mesquineries des voisins, les moments heureux sont rares, mais d'autant plus marquants. Télumée a appris de sa grand-mère une philosophie de la vie qui tend à se réjouir de ce que l'on a, et à ne pas se plaindre, à essayer de pardonner à ceux qui vous ont fait souffrir.

Le livre n'est à aucun moment misérabiliste, il essaie de donner de la dignité aux personnages qu'il décrit, aussi déshérités soient-ils. le spectre de l'esclavage et de ses souffrances plane en permanence sur la communauté, d'autant plus que pour subsister les anciens esclaves dépendent toujours de leurs anciens maîtres, qui possèdent plantations et terre, alors qu'eux-mêmes n'ont que leur corps à vendre pour subsister. Les relations entre les femmes et les hommes semblent particulièrement difficiles, surtout pour les femmes, qui souvent subissent violence, abandons, et qui doivent se débrouiller seules pour élever les enfants et faire subsister la famille. Mais le bonheur peut surgir lorsqu'on ne l'attendait plus, d'autant plus que l'on capable de se contenter de peu.

Un très joli livre, plein de vie et de verve, qui raconte de façon sensible et émouvante la vie de cette femme, de toutes ces femmes, et finalement de toute une communauté. J'ai été étonnée par l'écriture, car il n'y a pas vraiment d'expressions créoles, quelques tournures ou un vocabulaire tout au plus un peu inusité, cela dit ce n'est pas du tout gênant pour la crédibilité et cohérence du récit, et la langue de Simone Schwarz-Bart très fluide et inspirée, contribue dans une large mesure à la réussite du livre.
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