AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de bdelhausse


Selon l'angle que l'on prend pour analyser le général Dourakine, on aura Fasltaff ou Barbe-Bleue. Truculence et plaisir de vivre d'un côté. Vindicte et mauvaise foi de l'autre. On passe de Rabelais à Raspoutine... de la bonne chère à la cruauté brute en 2 lignes...

Imposant, tonitruant, fort en gueule et en amitié, revanchard, jouisseur, le Général Dourakine est un sacré personnage. Il aime autant qu'il déteste. Et quand il aime, c'est inconditionnellement. Et quand il déteste, c'est tout pareil.

Un des multiples épisodes de ce court roman va propulser le Général Dourakine face à une nièce qui n'en veut qu'à sa fortune, à ses posessions russes, dont elle voudrait l'usage hic et nunc. le plan machiavélique dressé par l'aristocrate russe est sans faille et sans pitié. Mais par ailleurs, il recueillera un ami polonais, enfermé au goulag sur de fausses présomptions de sécession.

Osons dire tout de suite que c'est terriblement suranné, ampoulé et que cela manque d'équilibre. L'idée même de présenter cela comme si c'était une pièce de théâtre en mettant d'abord le nom de la personne qui parle, ce n'est pas idéal. Ensuite, ce n'est au final qu'une succession de saynètes, sans trop de rapport, avec le voyage vers la Russie, l'entrée en scène de la nièce avide, l'arrivée du Prince polonais, le départ vers la France.

Moment de grâce, en ce qui me concerne: le long monologue du Prince sur ses conditions d'arrestation et de détention. le propos est grave. La Comtesse de Ségur se fait politique. de quoi éduquer sa petite-fille à qui cet ouvrage est destiné. Par contre, la toute fin du récit où Dourakine fait preuve d'autoritarisme et marie Natasha, 18 ans, au Prince, 28 ans... cela m'a laissé assez sceptique, pour ne pas dire davantage. OK, la morale est sauve car ils s'aiment sans oser se l'avouer... mais c'est assez poussé. Un récit qui témoigne d'une époque, d'une façon de voir les choses dans une noblesse un peu déconnectée du réel, ou paternaliste (c'est selon, suivant l'angle de vue adopté)... Ce n'est clairement pas #MeToo... Chacun jugera.

Et un coup de griffe sur la religion au passage, lorsqu'elle se mêle de politique. Je terminerai avec la dédicace de la Comtesse en introduction de l'ouvrage que j'ai lu (sur le Projet Gutenberg):

"A ma petite-fille Jeanne de Pitray,

Ma chère petite Jeanne, je t'offre mon dixième ouvrage, parce que tu es ma dixième petite-fille, ce qui ne veut pas dire que tu n'aies que la dixième place dans mon coeur. Vous y êtes tous au premier rang, par la raison que vous êtes tous de bons et aimables enfants. Tes frères Jacques et Paul m'ont servi de modèles dans l'Auberge de l'Ange-gardien, pour Jacques et Paul Dérigny. Leur position est différente, mais leurs qualités sont les mêmes. Quand tu seras plus grande, tu me serviras peut-être de modèle à ton tour, pour un nouveau livre, où tu trouveras une bonne et aimable petite Jeanne."

Cette dédicace est très belle. Elle indique, d'une certaine manière, à quel niveau il faut considérer ce livre. Comme un passage de témoin, comme une envie de laisser à ses petits-enfants une trace, un chemin à suivre.
Commenter  J’apprécie          140



Ont apprécié cette critique (12)voir plus




{* *}