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Critique de Eve-Yeshe


Julia Win vient de recevoir une lettre de son demi-frère U Ba qui vit toujours en Birmanie, dont elle n'a plus de nouvelles depuis dix ans. Avocate brillante à Manhattan, elle mène une vie, certes très active mais qui ne la satisfait pas vraiment. Cette lettre va la perturber et l'obliger à vraiment se poser des questions sur sa vie.

Un jour, alors qu'elle doit prendre la parole lors d'une réunion importante au travail, elle entend une voix qui la questionne : « Qui es-tu ? », « Pourquoi vis-tu seule ? », « qu'attends-tu de la vie ? ». Comme cette voix insiste, Julia finit par en parler à son amie, Amy Lee, bouddhiste adepte de la méditation. Elle consulte un psychiatre qui lui prescrit des neuroleptiques. Burn-out ? Schizophrénie ?


Julia est une jeune femme de trente huit ans, qui s'est séparée de son dernier compagnon, et n'a pas d'enfant. Elle investit toute son énergie dans son travail d'avocate, où elle est brillante et n'a pas vraiment conscience qu'un pan de sa vie lui échappe. Elle est seule à Manhattan, sa mère et son frère habitent à l'autre bout des USA et ils ne m'aiment guère, donc ils se voient très peu.

Son père, qui possède le don d'écouter les battements de coeur et de les harmoniser (cf. le précédent ouvrage de l'auteur) est retourné en Birmanie pour y mourir auprès de son premier amour, la mère d'U Ba. J'aime beaucoup cette expression : « harmoniser » les battements du coeur », c'est une invitation au voyage dans le pays de symboles.

On comprend que la vie occidentale a perdu son âme, en se plongeant dans le matérialisme, la consommation à tout prix, le toujours plus pour être satisfait car le plaisir ne peut venir que de l'extérieur. Nous ne savons plus être à l'écoute de notre corps, communiquer avec notre âme, la vie spirituelle quand elle existe part à la dérive, se délite, devient sujet de moquerie.

A l'opposé, en Birmanie, les gens, du moins ceux qui ne possèdent rien ou alors si peu qu'ils ne sont pas constamment dans le désir, n'ont pas peur de tout perdre, peuvent partager le peu qu'ils ont, ont du plaisir à se rendre service. Payer un service rendu est un affront.

On fait ainsi la connaissance de l'histoire de Nu Nu, son mariage, ses enfants Ko Gyi et Thar Thar, la dureté de leur mode de vie, l'amour qui l'unit à son mari, Maoung Sein . le destin de cette femme et de ses deux enfants est extraordinaire, avec la mort qui rode autour.

Elle est prête à tout pour empêcher que les militaires emmènent ses fils, et devra faire un choix qui va la hanter. Mais, je ne dévoilerai rien de plus, car il faut découvrir ce roman, le siroter, le goûter, s'imprégner des couleurs, des parfums, des épices, des longyi, les currys…

Qu'on s'intéresse ou non au Bouddhisme, que l'on croit ou non à la réincarnation, l'histoire est tellement belle et riche qu'on se laisse entraîner par l'auteur dans ce pays méconnu car fermé si longtemps par la junte au pouvoir. On n'en connaît en fait que la violence de la dictature, mais on en sait si peu sur le mode de vie, les rites et les coutumes des habitants… Au passage, l'idée d'accorder le coeur comme on accorde un instrument de musique avant d'en jouer me plaît énormément.

Le fait de ne pas avoir lu le premier roman de Jan-Philipp SENDKER ne dérange pas, car il a pris soin de nous donner les éléments nécessaires à notre compréhension, mais, étant donné que le thème en est l'histoire des parents de Julia, on a envie d'en savoir plus.

Donc, vous l'aurez compris, j'ai beaucoup aimé ce livre. Ce n'est pas un coup de coeur, mais pas loin. Il est bien écrit, l'histoire est belle, et on fait un voyage initiatique autant que dépaysant dans un pays qu'on a envie de découvrir davantage.
Note : 8,5/10

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