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Critique de CaroleBouchut


Un livre dense, riche. Enrichissant, surtout. Et pourtant sur un sujet qui a tant fait écrire et dire. Un livre à partir duquel pourrait partir un cours d'histoire pour nos enfants. Quoique, pour le moment je ne sais pas comment sera abordée cette période par les enseignants de mes enfants (bientôt en 5e et bientôt en 6e).
C'est une masse retraçant une vie personnelle et journalistique, sur une période qui semble s'étendre jusqu'à nous, mais composé avec le recul des années et de l'expérience.

Il y est question de monstruosité (s), de doute (s), de culpabilité (s), de honte (s), de dégoût. de transfert d'une multitude de sentiments de génération en génération. Une sorte de fardeau à transmettre, tout en s'allégeant peu à peu, imperceptiblement. Sentiments qui nous touchent tous, à différents niveaux. Je suis encore d'une génération (je suis née en 1975), en France, à laquelle les parents, publiquement, demandaient de chercher à comprendre par tous les moyens, mais aussi une génération à laquelle ces mêmes-parents, dans le privé, « répétaient que de bonnes notes, de bons résultats aux examens et la chance de pouvoir poursuivre une éducation supérieure dépendait aussi de leur capacité à éviter de développer une pensée indépendante et, plus encore, à éviter d'en faire part à leurs enseignants. ». C'est sur cette capacité à atteindre et à transmettre l'indépendance d'esprit, de réflexion, de compréhension que se joue l'incidence sournoise de ces transferts de sentiments.
Sentiments indicibles et diffus qui atteignent encore directement ceux de ma génération à travers ceux que portent leurs parents qu'ils portaient eux même de leurs grand-parents. Et quand je parle de « parents », c'est au sens large atteignant les frères, les oncles, les cousins..., masculins et féminins. Ces sentiments se retrouvent partout, en Allemagne, dans le monde occidental, en Europe et aussi en France où la Résistance est portée quasiment par tous comme un flambeau national. Mais pourtant, tout le monde n'était pas soit résistant soit collabo, soit noir soit blanc. Il y avait une grande masse de gris, pluriels et complexes, tout comme les noirs et les blancs étaient eux aussi complexes et pluriels.
C'est cette pluralité et cette complexité qui font le terreau sans cesse renouvelé de ces sentiments intergénérationnels. Et c'est justement là-dessus que s'appuie le travail de Madame Sereny. C'est ce qui en fait sa richesse.

Dans ce livre, il est donc question d'héritage culturel et émotionnel. le tout est traité par une immense journaliste, avec tout le recul qui lui était possible, avec ce désir de comprendre et de transmettre la compréhension de l'impensable, de l'innommable.

Je recommande chaudement cette lecture. Ce livre prend du temps à lire, à intégrer, à digérer. Et à relire. Mais le travail en vaut le coup. Vraiment.
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