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Critique de fanfanouche24


Le défaut des boulimiques dont je fais grandement partie... est cette curiosité insatiable qui fait se disperser. La présentation du dernier ouvrage de cette auteure turque, dans le Magazine "LIRE" de janvier 2018 m'a décidé à l'acquérir, alors que j'aurais pu ronger mon frein en lisant déjà un de ses romans, paru en poche, offert par un ami, il y a juste quelques mois : "Crime d'honneur"... mais non !!! Ce fut plus fort que tout, ce besoin de tout lire, tout embrasser, même si on sait bien que c'est impossible !

Alors me voilà happée par " trois filles d'Eve", captivée, touchée par ce personnage féminin, central, Peri, petite dernière et unique fille d'une fratrie de trois enfants...


Peri vénère son père, se désole de sa tristesse permanente, ainsi que du manque d'amour terrible entre ce père, homme laïc, lucide et militant et sa mère, tombée dans tous les excès religieux . Une famille éprouvée, habitant Istanbul... Cette ville y est décrite par notre écrivaine, avec énormément d'esprit critique et acéré...

Une colère intense contre les dérives de cette ville et du pays: la corruption, le fanatisme religieux, les traitements inacceptables contre les prisonniers, les mauvais traitements faits aux femmes dans la sphère privée autant que dans la sphère publique, le manque de liberté, l'hostilité vis à vis des livres profanes, etc.!

Une auteure courageuse, fière... portant haut les couleurs de la révolte et de la Liberté dû à chaque individu, mais aussi le droit à l'éducation, l'instruction, la bataille contre l'ignorance qui induit tous les sectarismes, les abus sur les plus vulnérables, dont les femmes !

Ce roman est captivant à plus d'un titre, et nous raconte mille détails liésaux usages, traditions et coutumes...de la Turquie !

Le récit de la vie de Peri se raconte , alternativement, sur deux périodes, entre les années 1980 [ où elle est acceptée à Oxford, à l'immense fierté de ses parents, mais surtout de son père... qui voulait le meilleur pour sa fille unique !] et plus de 30 ans après, en 2016...Ce qui est advenu des rêves, exigences de la jeune étudiante sérieuse, tourmentée et solitaire....

Un beau portrait de femme se cherchant entre les parents aimants, mais désaccordés... entre la jeune étudiante brillante, assoiffée de lectures, de savoir, de questionnements , l'abandon de ses études, à la suite d'une histoire bouleversante (dont je ne dévoilerai surtout pas la substance !!...) et la femme adulte, heureusement mariée, mère de famille, installée dans une existence bourgeoise et protégée...qu'elle n'aurait jamais imaginée.

Il n'empêche que le feu couve toujours sous la cendre de cette femme attachante, tentant de réunir toutes ses contradictions et ses ombres...!


Ce roman brasse une multiplicité de sujets, politiques, personnels, avec des questionnements récurrents sur toutes les dérives sectaires !

Un roman haletant qui dit à quel point la littérature est porteuse d'espoir, de liberté et d'indépendance de pensée... dans des pays aussi complexes que la Turquie, où apprendre, faire des études, avoir du sens critique, être une femme ... sont des handicaps... trop souvent frappés d'anathèmes, de synonymes de "mal" de "péché" dans une société développant moult sectarismes et intégrismes...

Un moment passionnant et foisonnant de lecture, qui, "cerise sur le gâteau" fait partie de ces ouvrages dynamiques, contenant beaucoup de références
littéraires... qui nous mènent ensuite à d'autres curiosités et d'autres élans de lectures....[avec en prime, une jaquette très réussie, colorée et orientalisante à souhait ] !

Un immense coup de coeur , qui m'a littéralement transportée ! Je ne peux résister à terminer sur un extrait... qui sous-tend un hommage constant aux
mots, à la littérature et aux horizons merveilleusement agrandis par la lecture ...Un hommage , également, double du savoir et de la tolérance, de plus en plus urgents, à nourrir et protéger dans des contextes sociaux violents et fanatiques !

"En outre, même si sa vie en dépendait, elle ne pouvait pas se faire aux réactions hostiles à la lecture. Dans divers coins du monde, on est ce qu'on dit et ce qu'on fait, mais aussi ce qu'on lit; en Turquie, comme dans tous les pays hantés par les problèmes d'identité, on se définit, d'abord, par ce qu'on rejette. Apparemment, plus les gens s'en prenaient à un auteur, moins ils avaient lu ses livres. "(p. 150)





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