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Critique de jvermeer


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J'ai une photo de Winslow Homer sous les yeux : bel homme, costume élégant, grosse moustache plantée dans un visage fin, un regard triste, le front effacé par un canotier de dandy.
Quasiment absent des collections des musées, Winslow Homer, peu connu en France, est considéré comme l'un des plus grands peintres américains du XIXème siècle, notamment pour ses illustrations sur la Guerre de Sécession, ses paysages de la nature et ses marines.

Il a 24 ans. Winslow Homer débute comme illustrateur indépendant pour le journal Harper's Weekly lorsque la Guerre de Sécession éclate. La revue l'envoie couvrir les actions nordistes sur le front. Durant ce conflit, il peint à l'huile les soldats dans l'action, ce travail le rend extrêmement célèbre dans son pays. Il s'intéresse également aux noirs et au thème de leur émancipation.

Il y pense depuis un bon moment : la peinture française l'intéresse. À la fin de l'année 1866, il décide de partir pour Paris où il va exposer ses toiles sur le thème de la guerre de sécession dans le pavillon américain de l'Exposition universelle de Paris. le travail des artistes de l'Ecole de Barbizon, en particulier Jules Breton et Jean-François Millet, l'intéresse plus que celui des peintres impressionnistes, alors à leurs débuts. Il partage avec eux un intérêt pour la peinture de plein air et l'art japonais. Dix mois en France, il peint une douzaine de toiles et repart chez lui sans semble-t-il avoir rencontré de grands peintres français comme Courbet ou Manet.

L'eau et la mer : durant toute sa carrière, Winslow Homer restera sensible à ces thèmes. Les panoramas romantiques et sauvages de la côte Est des Etats-Unis sont en vogue. Il aime introduire dans ses compositions une dimension narrative par le biais de personnages collés dans le paysage : baigneurs, pêcheurs, bucherons, chasseurs, marins.
Un séjour en Angleterre marque un tournant dans sa carrière. Il peint des aquarelles illustrant la vie simple des pêcheurs : elles sont vraies ces femmes du village de pêcheurs de Cullercoats. Leurs valeurs sont le travail, le courage, dans une vie de rudesse dont le sort dépend entièrement des ressources de la mer. Elles bravent les éléments tous les jours et mènent une existence liée aux forces de la nature. En les croquant, Homer a dû penser aux toiles de paysans peintes par Millet, « l'Angélus » et « les Glaneuses », qu'il vit en 1867 en France.

La technique de l'aquarelle est une des plus éclatantes réussites de ce peintre de grand talent. Cette peinture à l'eau apporte transparence, fluidité, et vibrations lumineuses dans ses toiles. Durant l'été 1880, Il expose des couchers de soleil rouge sur des mers vineuses donnant des effets saisissants. Certaines de ses représentations aux teintes incendiaires et des feux d'artifices en noir et orange donnent, par leurs jeux de couleurs et de lumière, un nouveau souffle à la peinture américaine. Sa toile « Voilier et feux d'artifice du 4 juillet » m'a fortement rappelé les somptueux « Nocturnes » de l'américain Whistler qui recherchait, à la même époque, une sensibilité moderne dans sa démarche, en particulier dans « Nocturnes en noir et or, la chute de la fusée ».

Homer va réussir à transposer les ressources expressives de l'aquarelle dans ses peintures à l'huile. En pleine pâte, dans des marines puissantes, très colorées, il restitue le mouvement des flots et de l'écume. Il peint au ras des flots pour donner plus de puissance aux vagues, obligeant le spectateur à reculer pour contempler ses toiles.

Une nuit de pleine lune le peintre sort de son atelier pour regarder deux jeunes filles dansant sur une pelouse en bord de mer, terrasse imaginaire. Cette toile « Nuit d'été » est la plus romantique que Winslow est jamais créée. Difficile de faire plus poétique que la vision de ce couple bercé par les flots. Monet lui-même admira cette peinture qui obtint une médaille d'or à l'Exposition universelle parisienne de 1900. L'Etat français l'acheta et l'on peut l'admirer aujourd'hui au Musée d'Orsay à Paris. (Les lecteurs qui ont lu mon recueil de nouvelles « Conter la peinture » ont dû remarquer celle intitulée « Un poète des flots » se rapportant à ce magnifique tableau.)

Les flots, la force des vagues, l'océan dans tous ses états. À partir des années 1890 et jusqu'à la fin de ses jours, retiré à Prout's Neck dans le Maine, dans un climat rude, au bord de l'océan, il continue à les peindre. L'homme y est souvent représenté face à la puissance menaçante de la mer. Parfois, il quitte les hivers rigoureux de la côte Est et part en voyage aux Bahamas, aux Bermudes, à Cuba et en Floride où il peint des toiles des îles aux couleurs éclatantes.
Il maîtrise parfaitement un métier qu'il a mis longtemps à apprendre.
« L'existence que j'ai choisie m'apporte mon lot de joies pour le restant de mes jours. le soleil ne se lèvera ni ne se couchera sans que je l'admire ou que je remercie. »

Lorsque Winslow Homer meurt en 1910, il occupe une place à part dans l'art américain. Curieusement, contrairement à nombre de ses confrères américains qui vinrent en France pour s'inspirer de Claude Monet à Giverny, Metcalf, Breck, Robinson, Frieseke, Homer n'a pas fait appel dans son travail à la technique impressionniste en vogue à cette époque. Il a suivi sa voie en réalisant un ensemble de paysages et marines, aussi bien à l'huile qu'à l'eau, d'une grande qualité esthétique.


Le superbe tableau « Nuit d'été » est visible sur ce lien ainsi que d'autres toiles de l'artiste :
https://www.wikiart.org/fr/winslow-homer/nuit-dete-1890

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Lien : http://www.httpsilartetaitco..
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