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Critique de Sarindar


Comment faut-il lire La Chanson de Roland ? Comme un poème épique de quatre mille vers composé au XIIe siècle par un auteur anglo-normand ? Comme un document qui nous renseigne sur l'expédition de Charlemagne dans la Péninsule hispanique en 778. Levant le siège tenu devant Saragosse où il était venu à l'invitation de Suleyman en révolte contre l'émir de Cordoue, il reflua vers la frontière et, au passage, son arrière-garde aurait été accrochée au col des Pyrénées par les Sarrassins, et c'est à Ronceveaux que Roland, gouverneur des marches de Bretagne et comte, aurait trouvé une mort héroïque.
La réalité, plus prosaïque, oblige à dire que les Sarrasins n'étaient pas en cause, et qu'à travers l'ennemi que combattaient les valeureux guerriers "chrétiens", il faut plutôt voir des meneurs de guérillas d'origine vasconne (donc des Basques). L'idéal de croisade, soulevé au XIe et au XIIe siècle, doit expliquer en partie cette substitution.
Mais c'est surtout une autre lecture qu'il faut faire: on voit bien ici, que l'Empereur Charlemagne est relégué au second plan, et que c'est la figure emblématique du chevalier qui est mise en avant sous les dehors de Roland, présenté comme le brave des braves et le plus vertueux des capitaines. le chevalier est souvent anobli, et là noblesse qui s'estime plus ou moins bridée et contrôlée en France et en Angleterre par des suzerains qui portent couronne de rois, a besoin de se revaloriser alors que la caste chevaleresque n'est bien souvent regardée que comme la servante armée des monarques. Pas étonnant que le récit de la Chanson de Roland ne donne pas le premier rôle au souverain et qu'il élève au paradis des grands hommes le preux Roland. C'est bien cela que cherche ce beau texte : transcender la réalité et l'embellir, quitte à faire un beau mensonge, pour donner le change. C'est le pourquoi de la littérature chevaleresque. Les héros adoubés chevaliers y passent avant les princes, alors que dans les faits c'est le contraire qui se dessine peu à peu, avec la vassalisation renforcée des nobles.

François Sarindar, auteur de : Jeanne d'Arc, une mission inachevée (2015)
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