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Critique de Odlag


Odlag
06 février 2021
Rocaille, de Pauline Sidre, est un roman en un seul volume de fantasy, je dirais même de dark fantasy, publié grâce à Projets Sillex, une maison d'édition et une plate-forme de financement participatif dédiées aux littératures de l'imaginaire qui permet une rémunération plus équitable des auteurs (pour plus d'infos, rendez-vous sur projets-sillex.com). Si ce roman s'est retrouvé dans ma liste, c'est parce qu'il fait partie de la sélection du PLIB 2021. Mais c'est surtout sa couverture, magnifique, qui m'a grandement attirée, et le résumé a fini de me convaincre de me lancer dans cette lecture.

Un roi mort ressuscité, de la magie, des bandits, un trône à récupérer, des intrigues de cour... Je me suis dit que ça allait être un récit vraiment prenant. Et bien j'ai été plutôt déçue. L'intrigue est intéressante, mais c'est la manière dont tout cela a été traité qui m'a déplu.

J'ai beaucoup aimé l'univers dans lequel se déroule l'histoire. La Rocaille est un pays dont la terre est maudite : aucune verdure ne parvient à y pousser, les arbres naissent déjà morts, il est impossible d'y cultiver quoique ce soit. Les habitants se nourrissent de la sève des arbres ou des rares racines qu'ils parviennent à trouver.
Les seuls fruits et légumes qu'ils peuvent obtenir viennent du château, où vit cloîtrée la famille royale dont les membres possèdent une sorte de "magie verte" qui leur permet de produire toutes sortes de plantes. Ce pouvoir est à la fois une bénédiction et une malédiction, car cela les empêche de sortir de l'enceinte du château, et nous en découvrons la véritable raison vers la fin du récit.

Gésill est un roi vert, nom donné aux souverains possédant cette magie fertile, que possèdent également son frère et sa soeur. Avant sa mort, Gésill ne portait aucun intérêt à la politique, qu'il laissait volontiers à ses conseillers, se contentant d'être là, sans véritablement régner, tel le roi fainéant dont il a la réputation. Sa mort va changer sa manière de voir les choses, notamment parce qu'il va découvrir, une fois ressuscité, comment est réellement la vie à l'extérieur : à quel point la terre est désolée et à quel point les habitants ont faim car la quantité de végétaux que sa famille fournit est insuffisante pour nourrir tout le monde. J'ai bien aimé cet aspect-là de son périple, ainsi que de le voir découvrir les différences entre ce qu'on lui a enseigné et comment cela se passe dans la vraie vie. Par exemple, l'escrime de cours est quasiment inutile dans un vrai combat, bien plus brutal et désordonné, sans véritable règle. Toutes ces constatations qu'il va faire au fil de son aventure vont ainsi le conduire à prendre de nouvelles résolutions.
Le sort utilisé par les bandits pour le ramener d'entre les morts lui octroie plusieurs vies, nous aurons donc l'occasion de le voir mourir à plusieurs reprises au cours de ses aventures. Malheureusement cette résurrection ne va pas sans complications : la mémoire de Gésill est défaillante, aussi est-il incapable de dire qui l'a assassiné, il ne possède plus le pouvoir de sa lignée et, le pire de tous ses problèmes, il pourrit. En fait, Gésill n'est plus qu'un mort qui marche et parle, incapable de ressentir quoique soit, qu'il s'agisse de sensations physiques ou d'émotions. Dans un sens, c'est intéressant de créer un tel anti-héros, mais le problème est que, du coup, j'ai vraiment eu du mal à m'attacher à ce personnage, que j'ai trouvé particulièrement mou, au caractère fort peu prononcé et beaucoup trop passif. Aussi n'ai-je pas du tout compris son soudain changement de comportement : à partir d'un certain moment de l'histoire, Gésill se met à devenir très possessif vis-à-vis du Magistre et jaloux envers quiconque s'approche de lui, au point d'en devenir particulièrement violent. Je ne dis pas qu'il n'y a aucune logique à cela, mais c'est la manière, totalement abrupte, dont ce comportement survient (puis disparaît) qui manque cruellement de crédibilité. Et ce d'autant plus que la relation entre Gésill et le Magistre est très peu développée.

Luelde a été détesté par sa famille dès sa naissance à cause de ce que sa peau constamment lumineuse signifiait : il est un Magistre. Les Magistres sont des personnes pourvues de dons qui leur permirent autrefois de rendre fertile une partie de la terre, où ils s'installèrent, régnant ainsi sur la Rocaille. Aujourd'hui les Magistres ont disparu, exterminés par le premier membre de la famille royale à laquelle appartient Gésill, dans le but de partager la "magie verte" avec le peuple, les Magistres étant accusés de garder les bénéfices de leurs dons pour eux seuls.
Luelde est donc le descendant de ce peuple. Détesté par certains, convoité par d'autres, sa vie a été une succession d'expériences diverses, parfois esclave, parfois homme-libre, souvent exploité, parfois respecté. Son don, qu'il a dû apprendre à maîtriser seul, est ainsi pour lui une malédiction, surtout qu'il ne peut cacher son identité à cause de sa peau, source de lumière à elle seule. C'est persuadé qu'il n'est qu'un piètre Magistre (si tant est qu'il en soit vraiment un), qu'il fait la rencontre de Gésill. Doutant de pouvoir l'aider, il n'aura cependant pas le choix car forcé d'obéir aux Funestrelles qui l'ont capturé. Ce périple ne lui sera cependant pas inutile, car cela lui permettra de découvrir des choses importantes sur ses ancêtres et sur sa magie.
Luelde est un personnage intéressant, de par son vécu et ses doutes quant à son utilité. Mais là encore, il y a quelques contradictions : d'un côté, il refuse d'être de nouveau soumis, d'un autre il se laisse aisément porter, un peu comme Gésill, parfois tout aussi passif. J'ai bien aimé les chapitres flash-back où l'on découvre la vie passée du jeune Magistre, ses différentes rencontres, ainsi que ceux qui permettent de comprendre ce qu'il s'est réellement passé autrefois, du temps où les Magistres régnaient sur la Rocaille et où ils se firent exterminer.
[...]

En bref...
Rocaille est un one-shot de fantasy qui semblait prometteur mais se révèle finalement très moyen. L'histoire est certes fort intéressante, tout comme l'univers dans lequel elle se déroule, mais, malgré tous les rebondissements, les révélations, les intrigues (politiques et autres), la manière dont cela a été traité n'est pas à la hauteur des idées mises en place. Tout est trop peu développé, que ce soient les relations entre les personnages ou les aventures qu'ils vivent, certains comportements ou événements manquent parfois de cohérence, donc de crédibilité. Et le style trop peu marqué, un peu plat bien qu'assez fluide, de l'autrice n'aide pas à faire passer ces défauts. Cela reste quand même une histoire qui se lit plutôt facilement.
Mais c'est vraiment dommage, car les idées étaient vraiment bonnes, j'ai trouvé beaucoup d'éléments intéressants, et j'ai aimé la fin bien qu'un peu trop vite expédiée à mon goût. Malheureusement, si la manière de raconter n'est pas la bonne, ça ne passe pas. Enfin, s'agissant là de son premier roman, l'autrice peut toujours s'améliorer. Je la garde donc à l'oeil.
Lien : https://escape-in-books.blog..
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