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Critique de Biblioroz


Une fin septembre froide et très humide sur La Rochelle, dans les années trente. Ce mercredi, un cinéma se vide de ses spectateurs et Philippe, le fils de Frédéric Dargens, propriétaire du cinéma, va retrouver Martine, en catimini. Celle-ci est tendue, blanche et fiévreuse, elle insiste pour que Philippe la regarde dans les yeux. Son père, Oscar Donadieu, a disparu le samedi précédent et elle désire savoir s'il est bien complètement étranger à ce malheur.
Oscar Donadieu, appelé l'Armateur, menait son entreprise et sa famille d'une main de fer. L'empire Donadieu se dresse quai Vallin, dans une grande bâtisse austère où l'Armateur, son fils Michel et son beau-fils Olsen travaillent, chacun à son étage, pour gérer les chalutiers et le charbon Donadieu. Ils habitent tous un hôtel particulier rue Réaumur, les familles occupant également chacune leur étage.
Mais voilà qu'à marée basse, on retrouve Oscar Donadieu noyé, le corps collé dans la vase du bassin de la Rochelle.
L'enquête rapide (il faut éviter toutes sources de scandale) conclut à la noyade accidentelle. Ce n'est pas le sujet du roman qui va plutôt se pencher sur l'incapacité de ses descendants et de sa femme à maintenir l'entreprise à flots et la sauver du naufrage. La forteresse Donadieu, bien installée dans la bourgeoisie Rochelaise, va prendre l'eau par toutes les fissures que les éléments de la famille vont s'échiner à élargir jusqu'à en faire de profondes crevasses.

Chez ces gens-là, il y a la mère, privée de mondanités par les règles imposées par son mari, et qui va commencer à vouloir tout régenter et surtout recevoir chez elle. Mais elle confond gestion d'une entreprise et fréquentations bourgeoises ! le fils aîné, Michel, n'a pas été épargné par l'auteur. C'est un mollasson écoeurant, gémissant sur son sort, dont l'unique souci est de séduire ou forcer secrétaires et autres bonnes. Les deux derniers, Martine et Kiki, étouffent dans ce cercle familial et ne pensent qu'à fuir. Kiki, chétif et malingre, a hérité de ce sobriquet car son père le jugeait indigne de porter le prénom de la famille : Oscar. Va-t-il confirmer le diagnostic paternel ou éclore ?

En périphérie de cette famille, Frédéric Dargens est un peu le négatif du cliché petit bourgeois qu'incarnait Oscar Donadieu. Fils de Banquier, grande fortune, il s'est retrouvé ruiné quand la banque a sauté et a ouvert un cinéma qui vivote entre des spectacles de danseuses et de prestidigitateurs et dans lequel il habite dans un réduis, vivant en bohème. Il fréquente à l'occasion les danseuses, comble du déshonneur pour cette bourgeoisie bien pensante. Malgré cela, il est l'ami, le confident de l'épouse de Donadieu ainsi que de sa belle-fille Eva. Il assurera le trait d'union entre les deux familles.
Son fils Philippe a séduit Martine, la seconde fille d'Oscar Donadieu. Il s'introduit dans sa chambre en transitant par le jardin de la bonne d'à côté, Charlotte, s'acquittant d'un droit de passage charnel. Plutôt bel homme, parangon d'ambition, il n'aura de cesse d'utiliser tous les moyens à sa disposition pour parvenir à ses fins et tenter de créer sa propre dynastie. Arrivera-t-il à entrer dans la famille par la grande porte ?

Ce petit monde va graviter de la Rochelle à la maison de vacances de St Raphaël, puis à Paris. Avec, toujours, les descriptions de Simenon, ruelles, maisons, mais aussi lumières, odeurs, sensations. « Malgré l'heure, de la rosée tremblait encore sur les herbes du talus et le soleil était voilé par l'haleine humide de la terre. »
Les pages se tournent vivement, laissant des empreintes d'égoïsme, de veulerie, d'ambition, de manipulation, d'amour fou, de médiocrité, de vices… le clan Donadieu ayant perdu son pilier, il paraît peu probable qu'il arrivera à colmater les lézardes qui se creusent.
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